17.
Gaina, qui appréhendait que si Tribigilde était enveloppé, et qu’il n’eût pas des forces suffisantes pour se défendre, il ne fût accablé, envoya plusieurs bandes d’étrangers qu’il avait avec lui, les unes après les autres, pour harceler l’armée romaine, et pour donner moyen à Tribigilde de s’échapper. Ces troupes étrangères attaquèrent sans cesse l’armée romaine jusqu’à ce qu’elles l’eussent défaite, tué Léon et désolé tout le pays désert. Ainsi les choses réussirent de la manière que Gaina le souhaitait; car Tribigilde s’étant enfui de Pamphylie, fit de plus grands désordres en Phrygie qu’il n’en avait jamais fait auparavant. Quant à Gaina, il releva avec des paroles si avantageuses les exploits de Tribigilde, qu’il fit appréhender à l’empereur, à la cour, et au sénat qu’il ne mit tout à feu et à sang aux environs de l’Hellespont, à moins qu’on ne lui accordât sa demande. Gaina tâchait encore alors de cacher à l’empereur ses sentiments, et de faire réussir ses desseins par le moyen des conditions que l’on accorderait à Tribigilde. Le mépris qu’on faisait de lui ne lui était pas si insupportable que l’élévation prodigieuse d’Eutrope, qui, ayant été fait consul, en avait retenu le titre longtemps, et était parvenu à la dignité de patrice. Ce fut principalement cette jalousie qui le détermina à la révolte. En ayant donc formé le dessein, il résolut de commencer par se défaire d’Eutrope. Pour cet effet, étant encore en Phrygie, il manda à l’empereur qu’il désespérait de résister à Tribigilde, et qu’il ne voyait point d’autre moyen de délivrer l’Asie de ses incursions dont elle était tourmentée que de lui accorder la demande qu’il faisait qu’on lui mit Eutrope entre les mains, comme l’unique auteur de toutes les misères publiques, pout en faire ce qu’il lui plairait.