38.
Alaric ayant formé le siège de Rome, le sénat soupçonna Séréna d’avoir fait venir les troupes étrangères, et fut d’avis, avec Placidie, sœur utérine de l’empereur, de la faire mettre à mort, dans la croyance qu’Alaric lèverait le siège lorsqu’il ne pourrait plus espérer de prendre la ville par son intelligence. Ce soupçon-là était cependant très faux, et Séréna n’avait jamais pensé à la trahison qu’on lui imputait. Mais elle devait porter la peine de l’impiété qu’elle avait autrefois commise. Lorsque Théodose l’ancien était allé à Rome après avoir détruit la tyrannie d’Eugène, et qu’il avait exposé le culte des dieux au mépris des hommes, en refusant de faire la dépense des sacrifices, les prêtres et les prêtresses avaient été chassés hors des temples. Alors Séréna, se raillant des choses saintes, était entrée dans le temple de la mère des dieux, et ayant vu qu’elle avait un fort beau collier, l’avait pris et l’avait attaché à son cou. La plus ancienne des vestales, qui était demeurée, ayant eu le courage de lui reprocher en face son impiété, elle se moqua d’elle et la fit chasser par ceux de sa suite. La vestale fit des imprécations en descendant, et souhaita que la peine due à ses sacrilèges retombât sur elle, sur son mari et sur ses enfants. Séréna ne fit que rire de ces menaces, et sortit du temple avec le collier. Il lui sembla plusieurs fois depuis, soit en veillant ou en dormant, qu’on la menaçait de mort. Plusieurs auf.res personnes eurent aussi de semblables visions. Mais enfin la justice divine la poursuivit de telle sorte qu’elle ne put éviter le châtiment, bien qu’elle en fût avertie, et elle fut étranglée par la même partie de son corps qu’elle avait parée du collier de la déesse.
On dit que Stilicon fut puni d’une pareille impiété. Ayant un jour commandé d’arracher des lames d’or qui étaient aux portes du Capitole, ceux qui exécutaient cet ordre y trouvèrent ces paroles écrites : « Elles sont réservées pour un misérable prince. » Ce qui fut accompli, puisqu’il mourut misérablement.