XI.
Ainsi donc j'ai démontré, par les premiers principes et par les conséquences qui en découlent, chacun des points mis en question; et dès lors il reste prouvé que la résurrection des morts n'est point, une œuvre au-dessus du pouvoir ni de la volonté de Dieu, et qu'elle n'est point indigne de lui. Maintenant se trouvent confondus l'erreur et les absurdes raisonnements de l'incrédulité. Est-il besoin d'ajouter qu'établir un de ces points c'est avoir établi l'autre, et de montrer leur rapport et leur liaison? Mais faut-il se servir des mots de rapport et de raison comme s'il y avait ici quelque différence? n'est-il pas vrai que tout ce que Dieu peut il le veut, et que tout ce qu'il veut il le peut aussi, sans blesser aucune de ses divines perfections ? Rappelons-nous ce que nous avons dit dès le commencement de ce discours, qu'il faut parler pour la vérité et sur la vérité ; qu'il ne suffit pas de l'établir, qu'il faut encore la défendre; qu'il existe une grande différence entre l'un et l'autre; en quelles circonstances, à l'égard de quelles personnes il fallait employer ces deux moyens. Pour mieux expliquer ma pensée et lier ce que nous avons dit avec ce que nous allons dire, qu'il me soit permis de mettre à la tête de ma seconde partie le même préambule par où j'ai commencé la première. Démontrer la vérité c'est plus que la défendre ; mais je soutiens en même temps que la défense doit accompagner ou plutôt précéder la démonstration, comme un satellite, lui aplanir les voies et écarter tous les obstacles qui s'opposeraient à une pleine conviction. Comme il importe à tout homme de pourvoir avant tout à son salut et à sa sûreté, la démonstration de la vérité est le point essentiel , et dès lors elle occupe la première place par sa nature , par son rang et par son utilité : par sa nature, elle donne la connaissance même des choses ; par son rang, elle ne fait qu'un avec les choses mêmes qu'elle établit ; par son utilité, en elle se trouve l'assurance et le gage du salut. La simple défense de la vérité est secondaire par sa nature et par son importance; il est plus utile d'établir une vérité que de réfuter une erreur; elle est bien inférieure par le rang, elle ne s'adresse qu'à ceux qui sont imbus de fausses opinions. Or, qui ne sait que l'erreur n'est qu'une altération de la vérité et le fruit d'une mauvaise semence jetée après coup ? Quoi qu'il en soit, l'apologie a souvent l'initiative, et souvent aussi elle rend les plus grands services; car elle détruit l'incrédulité qui bourdonne aux oreilles des uns et subjugue les autres, surtout ceux en qui le doute et le préjugé ne font que de naître. Au reste, l'une et l'autre, c'est-à-dire la défense et la démonstration de la vérité, concourent au même but, qui est de préparer l'homme à une solide piété; cependant elles ne sont pas la même chose, et il ne faut pas les confondre : l'une, je l'ai déjà dit, est indispensable à tous ceux qui croient et qui ont à cœur la vérité et leur salut ; l'autre est quelquefois plus utile pour ou contre certains esprits. Dans ce résumé, je n'ai voulu que vous rappeler succinctement ce que j'ai dit plus haut. Arrivons maintenant à la seconde partie de mon discours : je vais prouver la vérité de la résurrection, en vous montrant d'abord pour quelle raison Dieu a créé le premier homme et ses descendants, bien que le mode de création ait été différent ; ensuite la nature commune des hommes considérés en tant qu'hommes; Je jugement futur qui les attend, jugement qui s'étendra à toute leur vie et à la manière dont ils l'auront passée, jugement où le créateur fera éclater toute son équité, comme personne ne peut en douter.