1.
MES CHERS ENFANTS,
BIEN des motifs m'engagent à vous donner les conseils que je crois les meilleurs pour vous et les plus salutaires. A l'âge où je suis, le grand nombre d’événements par où j'ai passé, les révolutions diverses que j'ai éprouvées, ces révolutions si propres à instruire, m'ayant donné de l'expérience, je dois être en état de montrer le chemin le plus sûr à des jeunes gens qui commencent leur carrière. D'ailleurs, après vos parents, personne ne vous touche de plus près que moi , de sorte que j'ai pour vous une tendresse vraiment paternelle ; et , si je ne m'abuse sur vos sentiments, je me flatte aussi que vous me regardez comme tenant la place des auteurs de vos jours. Si donc vous êtes dociles à mes préceptes , vous serez dans le second ordre de ceux que loue Hésiode : sinon , sans vous rien dire d'offensant, je me contenterai de vous rappeler les vers de ce poète, dans lesquels il dit, que le premier mérite est de voir par soi-même ce qu'il y a de mieux à faire ; le second, de pouvoir suivre les avis utiles qu'un autre vous donne ; mais que celui-là n'est bon à rien , qui ne sait ni agir par soi-même, ni profiter des conseils d'autrui1.
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Hésiode , dans le poème intitulé : Les ouvrages et les jours ,v. 291. Cette pensée du poète grec a été souvent répétée après lui , entr'autres par Tite-Live dans le discours de Minucius au dictateur Fabius. ↩