CHAPITRE XIII : LETTRE D'ANTONIN A L'ASSEMBLÉE D'ASIE SUR NOTRE DOCTRINE
« L'empereur César Marc Aurèle Antonin Auguste, Arméniaque, souverain pontife, tribun pour la quinzième fois et consul pour la troisième [7 mars-9 décembre 161], à l'assemblée d'Asie, salut. [2] Je sais que c'est aussi aux dieux de veiller à ce que de tels hommes n'échappent pas au châtiment; car ce serait à eux, bien plutôt qu'à vous-mêmes, de punir ceux qui ne veulent pas les adorer. [3] Vous jetez ces gens dans le trouble, et vous les ancrez dans la croyance qui est la leur, en les accusant d'athéisme. Mais quand ils sont inculpés, ils estiment préférable de se montrer en mourant pour leur Dieu que de vivre. C'est de là qu'ils tirent leur victoire, sacrifiant leur vie plutôt que de consentir à ce que vous leur demandez de faire. [4] Quant aux tremblements de terre passés ou présents, il n'est pas hors de propos de vous rappeler, à vous qui perdez si facilement courage quand ils se produisent, que vous feriez bien 409 de comparer notre conduite avec la leur. [5] Ils sont pleins de confiance en Dieu ; vous, pendant tout le temps où vous semblez être plongés dans l'incurie, vous vous désintéressez et des autres dieux et du culte de l'immortel ; celui-ci, les chrétiens l'adorent, et vous les pourchassez et les persécutez jusqu'à la mort. [6] Beaucoup de gouverneurs de province du reste ont écrit déjà à notre très divin père au sujet de ces hommes. Il leur a répondu qu'il ne fallait pas les inquiéter, s'il n'était pas prouvé qu'ils entreprissent rien contre la souveraineté romaine. Plusieurs se sont aussi adressés à moi-même, je leur ai écrit en me conformant à son avis. [7] Si donc quelqu'un s'obstine à faire une affaire à un chrétien parce qu'il est chrétien, que cet inculpé soit renvoyé des fins de la plainte, lors même qu'il serait évident qu'il est chrétien, et que l'accusateur soit puni. Promulgué à Ephèse dans l'assemblée d'Asie (voy. l'Appendice). »
[8] Que les choses se soient ainsi passées, c'est ce dont témoigne Méliton, évêque de l'église de Sardes, et alors bien connu. Cela du moins ressort de ce qu'il dit dans une apologie de notre doctrine adressée par lui à l'empereur Vérus.
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L'authenticité de la lettre d'Antonin a été défendue par M. HARNACK, Das Edikt des Antoninus Piux (Leipzig, 895), qui a tenté d'en restituer le texte, en éliminant un certain nombre d'interpolations. Voy. un résumé de M. SALTET. dans la Revue d'histoire et de littérature religieuses, t. 1 (1896), p. 384, avec les principales objections que soulève cette opération. En général, on est resté sceptique et le document n'est pas réhabilité voy. M. SCHANZ, Geschichte der römischen Litteratur, t. III. 2e éd., 1905, p. 249). M. Schwartz croit que c'est la traduction d'un apocryphe rédigé en latin. Les noms et les titres de l'empereur sont erronés et il est à peu près impossible de tirer un sens des §§ 1 et 5. De plus, le ms. de saint 513 Justin, Β. Ν. gr. 450, daté de 1301. donne à la suite des Apologie*, un autre texte gree. C'est probablement une version différente du même original. Voici ce texte, tel «|ue M. Schwartz l'a édité d:ms son édition de ÏHisl. ceci. ifEusèbe, t. I, p. :t28. Si le sens est semblable, il y a de nombreux écarts dans l'expression. Ἀντωνίνου ἐπιττολή πρὸς τὸ κοινὸν τῆς Ἄσίας Αὐτοκράτωρ Καῖταρ Τίτος Αἴλιος Ἀδριανὸς Ἀντωνϊνος Σεβαστός Εὐσεβής, ἀρχιερεὺς μέγιστος, δημαρχιχῆς ἐξουσίας τὸ xδ' ὕπατος τὸ δ'[ἐξουσίας ὕπατος; πδ' ms. ] ( 10 déc. 160 — 7 mars 161), πατὴρ πατρίδος [ τὸ κα' ad. ms. ; corrigé par M. Schwartz] τῷ κοινῷ τῆς Ἀσίας χαίρειν. Ἐγὼ ᾤμην ὅτι καὶ τοῖς θεοῖς ἐπιμελὲς [τοὺς θεοὺς ἐπιμελεσις ms. ] ἔσεσθαι μὴ λανθάνειν τοὺς τοιούτους· πολὺ γὰρ μᾶλλον ἐκείνους κολάσοιεν, εἴπερ δύναιντο, τοὺς μὴ βουλομένους αὐτοῖς προσκυνεΐν· οἷς ταραχὴν ὑμεῖς ἐμβάλλετε, καὶ τὴν γνώμην αὐτῶν ἥνπερ ἔχουσιν, ὡς ἀθέων κατηγορεῖτε καὶι ἕτερα τινα [ἐμνάλλετε] ἅτινα oὐ δυνάμεθα ἀποδεῖξαι. Εἴη δ' ἂν ἐκείνοις χρήσιμον τὸ δοκεῖν ἐπὶ τῷ κατηγορουμένῳ τεθνάναι, καὶ νικῶσιν ὑμᾶς, προιέμενοι τὰς ἑαυτῶν ψυχὰς ἥπερ [εἴπερ ms.] πειθόμενοι οἷς ἀξιοῦτε πράσσειν αὐτούς. Περὶ δὲ τῶν σεισμῶν τῶ γεγονότων καὶ τῶν γινομένων, οὐκ ἀπεικός [εἰκός ms. ] ὑπομνῆσαι ὑμᾶς ἀθυμοῦντας ὅτανπερ ὦσι, παραβάλλοντας [-ες ms.] τὰ ὑμέτερα πρὸς τὸν ἐκείνων, ὅτι εὐπαρρνσιαστότεροι ὑμῶν γίνονται πρὸς τὸν θεὸν, καὶ. ὑμεῖς μὲν ἀγνοεῖν δοκεῖτε παρ' ἐκεῖνον τὸν χρόνον τοὺς θεοὺς καὶ τῶν ἱερῶν ἀμελεῖτε, θρῃσκείαν δι' τὴν περὶ τὸν θεὸν oὐx ἐπίστασθε· ὅθεν καὶ τοὺς θρῃσκεύοντας ἐξηλάκατε [ἐζηλώκατε ms.] καὶ διώκετε ἕως θανάτου. Ὑπὲρ τῶν τοιούτων καὶ ἄλλοι τίνὲς τῶν περὶ τὰς ἐπαρχίας ἡγεμόνων τῷ θειοτάτῳ μου πατρὶ ἔγραψαν· οἷς καὶ ἀντέγραψε μηδὲν ἐνοχλεῖν [ὀχλεῖν ms. ] τοῖς τοιούτοις, εἰ μὴ φαίνοιντό τι ἐπὶ τὴν ἡγεμονίαν Ῥωμαίων ἐγχειροῦντες. Καὶ ἐμοὶ δὲ περὶ τῶν τοιούτων πολλοὶ ἐσήμαναν. οἷς δὴ καὶ ἀντέγραψα τοῦ πατρός μου κατακολουθῶν γνώμῃ. Εἰ δέ τις ἔχοι πρός τινα τῶν τοιούτων πρᾶγμα καταγέρειν ὡς τοιούτου, ἐκεῖνος ὁ καταφερόμενος ἀπολελύσθω τοῦ ἐγελήματος κἂν φαίνηται τοιοῦτος ὤν, ἐκεῖνος δὲ ὁ καταφέρων ἔνοχος ἔσται τῇ δίκῃ. ↩