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Works John Chrysostom (344-407) Ad Stelechium de compunctione liber II Au moine Stéléchius

6.

Il est d'un serviteur reconnaissant de tenir pour accordés à lui-même en particulier les bienfaits distribués par Dieu à la communauté du genre humain, et de montrer autant de sollicitude et d'empressement pour acquitter sa dette de gratitude, que s'il était seul débiteur et seul responsable. Et c'est là ce que faisait le grand Paul, que je ne me lasserai jamais de citer, lorsqu'il disait que le Seigneur était mort pour lui. Ce que j'ai maintenant de vie dans ce corps mortel, disait-il, je l'ai en la foi du Fils de Dieu, qui m'a aimé et s'est livré lui-même pour moi. (Gal. II, 20.) L'Apôtre parlait ainsi, non pour amoindrir le don de Jésus-Christ, mais afin de s'animer lui-même à se regarder comme responsable pour le tout, et d'engager chacun de nous à penser de même : car il est évident que si le Christ fût venu pour un seul homme, le don, au lieu d'être moindre, eût encore été plus grand. Pourquoi? parce qu'on verrait que le Sauveur a montré, pour un seul, autant de bonté et de sollicitude, qu'en faisait paraître le pasteur de la parabole qui cherchait, tout troublé et tout en pleurs, sa brebis perdue.

Si les hommes qui ont emprunté de l'argent et contracté trop de dettes pour pouvoir les payer ne goûtent plus ni sommeil ni nourriture au milieu des soucis qui les rongent, que ne doit pas éprouver le juste en considérant la dette non d'argent, mais de sacrifice qu'il a contractée?

Quant à nous, hélas ! telles ne sont point nos dispositions. Nous arrive-t-il de payer quelque petite partie de cette dette, alors nous nous conduisons comme si nous l'avions acquittée tout entière. Que dis-je ? nous agissons plus mal encore. Le peu de bien que nous faisons, nous ne l'accomplissons pas avec ce bon coeur qui sied à de vrais enfants avant de nous mettre à l'oeuvre, nous examinons si une récompense, si une grande récompense est attachée à telle action, et si cette action nous sera comptée : bref, nous parlons absolument comme des esclaves et des mercenaires.

Que dis-tu là , misérable mortel ? Faut-il que tu aies le coeur si étroit? Quoi ! voilà une action à faire, qui plaît à Dieu; et tu restes là, délibérant sur la récompense ! Devrais-tu donc reculer devant l'accomplissement du bien, quand même il te faudrait tomber dans l'enfer, après l'avoir fait? Ne devrais-tu pas au contraire, même dans ce cas , te mettre résolument à l'oeuvre ? Tu as le bonheur de faire une chose qui plait à Dieu, et tu mendies une autre récompense ! Ah ! vraiment, tu ne sais pas quel grand bien c'est que de plaire à Dieu : si tu. le savais, tu ne penserais pas qu'il puisse exister une autre récompense égale à celle-là. Ignores-tu que ta récompense augmente, lorsque ce n'est point la vue de la rétribution qui te pousse et te dirige dans l'accomplissement du devoir? Ne vois-tu pas que les hommes eux-mêmes sont unanimes à honorer surtout les serviteurs qui envisagent, avant toutes choses, non la récompense, mais le bon plaisir du maître; beaucoup plus soucieux de bien servir, que d'être largement rétribués? Eh quoi ! des hommes montreront tant de générosité à l'égard d'autres hommes, qui sont après tout leurs semblables : et toi , tout enrichi que tu es des dons du Seigneur; toi qui en attends, pour l'avenir, de si nombreux encore, quand il s'agit de faire quelque chose qui regarde ton propre salut, voilà qu'avant de te mettre à l'oeuvre, tu es en peine de la récompense ! Ah ! je ne m'étonne plus si nous sommes en tout si froids, si misérables, si dépourvus d'élan pour toute action généreuse. Je ne m'étonne plus si nous ne pouvons jamais ni vivre dans la componction, ni recueillir tant soit peu les puissances de notre âme. Et en effet, nous ne recherchons jamais nos fautes avec la diligence voulue, nous ne méditons point sur les bienfaits de Dieu; nous ne jetons point les yeux sur ces illustres personnages qui ont accompli de si grandes choses. Nous négligeons la pratique du bien; nous ne gardons point de mesure dans la prospérité; et quand nous nous appelons pécheurs, ce n'est point avec sincérité que nous tenons ce langage. Et la preuve, c'est que, si les autres nous donnent ce nom, aussitôt notre colère éclate, notre emportement n'a plus de bornes, nous disons qu'on nous outrage. Ainsi, tout en nous n'est qu'hypocrisie. Nous n'imitons point le publicain, qui , entendant le pharisien l'injurier et lui reprocher la multitude de ses crimes, supporta sans mot dire cet affront et recueillit le fruit de ses vertus, fruit que nous connaissons : Car, dit l'Evangile, il descendit justifié dans sa maison , et non pas l'autre. (Luc, XVIII, 14.) Pour nous, bien que nous soyons tout remplis d'iniquités, nous ne savons pas ce que c'est que d'en faire l'aveu.

Cependant , nous ne devrions jamais oublier que nous avons commis mille et mille fautes, nous devrions porter écrites dans notre coeur, comme dans un livre, ces mêmes fautes, petites et grandes, et les pleurer comme si nous venions de nous en rendre coupables. Ce souvenir continuel de nos misères servirait du moins à réprimer les mouvements d'orgueil toujours prêts à s'élever dans notre âme. Il est si avantageux de se rappeler ses fautes, que saint Paul ne cesse pas de parler de ses péchés depuis si longtemps pardonnés. Malgré le baptême qui l'avait purifié de toutes ses iniquités passées , malgré la vie sainte et pure qu'il mena toujours depuis son baptême, malgré l'état d'une conscience qui ne lui reprochait rien sur quoi il dût gémir, il ne laissait pas de se rappeler les péchés que l'eau salutaire avait cependant effacés, et de dire: Jésus-Christ est venu dans ce monde pour sauver les pécheurs, entre lesquels je suis le premier (I Tim. I, 15) ; et encore : Il m'a jugé fidèle en m'établissant dans le ministère, moi qui étais autrefois un blasphémateur, un persécuteur et un ennemi acharné; car je persécutais à outrance l'Eglise de Dieu , et je la ravageais (I Tim. I, 12, 13); et dans un autre endroit : Je ne suis pas digne d'être appelé Apôtre. (I Cor. XV, 9.)

Nous devons espérer que Dieu nous a pardonné les péchés de notre vie passée, pourtant il est bon de nous les rappeler : ce souvenir porte l'âme à une sainte confusion, et l'excite vivement à l'amour de Dieu. Aussi, lorsque le Seigneur demanda à Simon lequel des deux débiteurs aimerait davantage le créancier généreux, Simon ayant répondu : Je crois que c'est celui à qui il a le plus remis, Jésus lui dit : Vous avez bien jugé. (Luc, VII, .43.)

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Au moine Stéléchius

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