1.
Est-ce que vous avez pris en dégoût la lutte contre les Juifs, ou si vous voulez que nous traitions encore aujourd'hui le même sujet? Quelque longuement que nous en ayons déjà parlé, il me semble que vous êtes désireux d'en entendre parler encore. Quiconque, en effet, ne se lasse pas d'aimer Jésus-Christ, ne se lassera non plus jamais du combat livré à ceux qui haïssent Jésus-Christ. Outre cette raison, le discours d'aujourd'hui sera encore nécessaire pour un autre motif : leurs fêtes ne sont pas encore toutes passées. Si leurs trompettes étaient pires que celles qu'on entend sur les théâtres, et leur jeûne , plus honteux que toute espèce d'ivresse et d'orgie : les tentes qui se dressent maintenant chez eux ne valent guère mieux que les auberges où logent les prostituées et les joueuses de flûte. Et que personne n'accuse de témérité ces paroles : la dernière des témérités et la souveraine prévarication est de ne pas penser ainsi sur leur compte. Quand, en effet, ils luttent par leurs Deuvres contre Dieu et résistent à l'Esprit-Saint, comment ne pas porter contre eux cette sentence? La fête des Tabernacles était vénérable autrefois, quand elle se célébrait selon la Loi et le commandement de Dieu, mais maintenant, elle ne l'est plus : toute sa dignité lui a été ôtée, parce qu'elle ne se célèbre plus selon l'intention de Dieu. Ceux qui méprisent le plus la Loi et les fêtes anciennes sont ceux que l'on voit les célébrer maintenant avec le plus de zèle. Ce ne sont pas les Juifs qui honorent la Loi, c'est nous, nous qui là laissons en repos comme un homme devenu vieux, nous qui ne l'entraînons pas dans l'arène avec ses cheveux blancs, et ne la forçons pas à combattre après le temps. Que ce ne soit plus maintenant le temps de la Loi ni des anciennes institutions, nous l'avons assez démontré précédemment; courage donc l encore quelques efforts, et notre oeuvre sera achevée. Il suffisait, à la vérité, pour terminer à notre avantage cette controverse avec les Juifs, d'avoir démontré que c'est une prévarication et une impiété de célébrer ces fêtes hors de Jérusalem. Quand même; en effet, il serait vrai, comme ils s'en vantent partout et le murmurent constamment à l'oreille, qu'ils recouvreront leur ville, même en ce cas leur prévarication serait un chef d'accusation sous le poids duquel ils succomberaient nécessairement. Néanmoins , nous avons encore démontré par surcroît, et que la ville ne sera pas relevée et qu'ils ne recouvreront pas leur constitution antique.
Cela démontré, on est d'accord sur tout le reste, c'est-à-dire, que ni la forme du sacrifice, ni celle de l'holocauste, ni la force de la Loi, ni aucune autre partie de leurs institutions, ne pourront rester debout. Et d'abord, la Loi prescrivait que, trois fois l'an, toute personne du sexe masculin montât au temple (Exod. XXIII, 17); or, le temple étant détruit, il est impossible que cela se fasse. Puis, elle ordonnait encore que celui qui avait une gonorrhée ou la lèpre, que la femme dans le temps de la menstruation ou après ses couches , offrissent des sacrifices (Lév. XV); or, c'est encore là une chose impossible, puisqu'on ne voit plus ni l'emplacement du temple, ni l'autel. Elle ordonnait aussi de chanter des hymnes sacrées, et nous avons montré précédemment que cela est maintenant défendu en raison du lieu , et que les prophètes font des reproches aux Juifs qui, sans tenir compte de cette défense, lisaient la Loi dehors, et chantaient des cantiques de louange.
Puisqu'ils n'avaient pas même le droit de lire la Loi hors de la ville, comment donc auraient-ils le droit de la pratiquer hors de la ville ? Aussi le Prophète leur dit-il en usant même de menace : Je ne visiterai pas vos filles quand elles se prostitueront , ni vos jeunes femmes quand elles commettront l'adultère. (Osée. IV, 14.) Qu'est-ce à dire ? J'essayerai de vous éclaircir ce texte en citant une ancienne loi. Quelle est donc cette loi ? Si une femme prévarique contre son mari, qu'elle le néglige par mépris, qu'elle ait un commerce criminel avec un autre homme, et quelle ait trompé les yeux de son mari, qu'il n'y ait pas de témoin contre elle, qu'elle n'ait pas été surprise, et que l'esprit de jalousie s'empare du mari sans que sa femme soit souillée (Nomb. V, 12, 14.) En d'autres termes : Si une femme commet l'adultère, et que le mari le soupçonne, ou si elle ne le commet pas, et qu'il le soupçonne néanmoins, sans qu'il y ait de témoin, sans que la grossesse le prouve, il la conduira au prêtre, est-il dit, et il présentera pour elle, en offrande, de la farine d'orge. (Nomb. V, 15.) Pourquoi pas de la fleur de froment ni de la farine de blé, mais d'orge? Parce que ce qui avait lieu ici était un deuil, une accusation et un soupçon mauvais, et que la forme du sacrifice devait représenter le malheur domestique. C'est pourquoi il est dit ensuite: Tu n'y répandras point d'huile, et tu ne mettras pas d'encens dessus. Ensuite (car il faut abréger), le prêtre amènera la femme, il prendra de l'eau pure dans un vase d'argile, et prenant de la terre qui est sur le pavé, il la jettera dans l'eau ; puis il fera tenir la femme debout, il l'adjurera et lui dira: Si tu ne t'es pas souillée en prévariquant contre ton mari, sois sauve de l'eau de la répréhension; mais si tu as prévariqué et si tu t'es souillée, si quelqu'un s'est approché de toi, à l'exception de ton mari, que le Seigneur te rende un objet de malédiction et d'exécration au milieu du peuple. (Ibid. V, et suiv.) Qu'est-ce à dire un objet de malédiction et d'exécration ? Cela veut dire : Afin que tu serves d'exemple aux autres et que l'on dise en voyant ton châtiment : qu'il ne m'arrive pas ce qui est arrivé à telle femme ! Continuons : Que le Seigneur fasse enfler ton ventre, et que l'eau maudite entre dans ton estomac pour le faire crever. Et la femme dira : Ainsi soit-il, ainsi soit-il! Et il arrivera, si elle est souillée, que l'eau de la répréhension entrera, et fera crever son ventre, et la femme sera un objet de malédiction; niais si la femme n'a pas été souillée , elle ne ressentira aucun mal, et pourra encore enfanter. (Ibid.) Comme rien de tout cela ne devait plus être possible lorsque les Juifs seraient emmenés en captivité, puisqu'il n'y aurait plus ni temple, ni autel, ni tabernacle, ni sacrifice offert, c'est pourquoi Dieu dit sous forme de menace : Je ne visiterai pas vos filles quand elles se prostitueront, ni vos jeunes femmes quand elles commettront l'adultère. (Osée. IV, 14.)