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Works John Chrysostom (344-407) In Matthaeum homiliae I-XC Commentaire sur l'Evangile selon Saint Matthieu
HOMÉLIE XXVIII

4.

Si quelqu’un veut entendre cette histoire dans le sens anagogique, je ne m’y oppose pas. Il suffit qu’il reconnaisse que la vérité de l’histoire est telle que l’Evangile la rapporte. Or la leçon que nous donne ce passage ainsi entendu c’est que lorsque les hommes vivent en pourceaux, ils tombent aisément sous la puissance (235) du démon. Tant qu’ils demeurent encor hommes, et qu’ils ne sont pas tout à fait pourceaux, ils peuvent comme les deux possédés être encore délivrés de la puissance du diable; mais lorsqu’ils ont étouffé en eux tous les sentiments de l’homme, le démon non-seulement s’empare d’eux, mais il les précipite dans l’abîme. Afin que personne ne prît pour une fable l’expulsion des démons, mais que l’on y crût comme à un fait certain, Jésus-Christ permet que l’on en voie la preuve dans la mort des pourceaux.

Mais qui n’admirera ici la bonté du Sauveur en même temps que sa puissance? Ces hommes qui ont reçu un si grand bien du Sauveur dans la délivrance de ces possédés, sont assez ingrats pour le faire sortir de leur pays, et lui ne s’y oppose pas, mais il se retire, sans témoigner la moindre résistance. Après qu’ils se sont déclarés si visiblement indignes de la prédication de sa parole, il les quitte et se retire loin d’eux. Il leur laisse pour maîtres ceux qui avaient été possédés, et ceux qui paissaient les pourceaux, afin qu’ils apprissent d’eux comment tout s’était passé.. Mais en s’éloignant de ce peuple, il le laissa pénétré de crainte. Car la grandeur de la perte éprouvée, favorisait la divulgation de l’événement, dont le prodige dut faire une forte impression sur les esprits. Le bruit du miracle éclatait de toutes parts. Il était publié par toutes sortes de gens, par ceux qui avaient été délivrés, par les maîtres à qui appartenaient ces pourceaux, et par ceux qui les gardaient.

Il y a encore aujourd’hui, mes frères, bien « des possédés qui demeurent dans des sépulcres,» et dont rien ne saurait retenir la fureur: ni le fer, ni les chaînes, ni les exhortations, ni les menaces, ni la crainte de Dieu ou des hommes. Quelle différence y a-t-il entre. un. homme possédé du démon et un impudique, qui s’abandonne aux dérèglements les plus infâmes, dont le coeur commet autant de crimes qu’il se présente d’objets à ses yeux? Il ne le croirait pas « nu » ; il l’est néanmoins, quelque magnifiquement habillé qu’il vous paraisse parce qu’ayant perdu Jésus-Christ dont il était revêtu, il a été dépouillé de toute sa gloire : « Il ne se frappe pas à coups de pierres, » mais il se brise par ses péchés, qui font à l’âme des plaies plus sanglantes que les pierres n’en font au corps.

Qui pourra donc lier un tel homme? Qui pourra l’arrêter ? Qui pourra le délivrer de cette passion qui l’agite et le tourmente, qui l’emporte hors de lui-même, et qui le fait toujours demeurer « dans les sépulcres» ? Ne sont-ce pas en effet des sépulcres, ces lieux infâmes où il passe sa vie, et ces détestables repaires de femmes perdues, où la corruption et la pourriture répandent de toutes parts une odeur de mort?

Ne pouvons-nous pas dire aussi de l’avare ce que nous avons dit de l’impudique? Qui peut le retenir? Qui peut « le lier »? N’est-il pas vrai « qu’il rompt ses chaînes», qu’il se rit également de toutes les exhortations, de toutes les menaces, et de tous es conseils? Ne conjurent-ils pas tous ceux qui tâchent de le guérir de son avarice, de ne le pas faire? et ne regarde-t-il pas comme un supplice, d’être délivré d’un cruel supplice? Y a-t-il au monde un état plus misérable que celui-là? Si «ce « possédé » de l’Evangile méprisa les hommes, il se rendit au moins à la parole de Jésus-Christ; mais l’avare n’écoute pas Jésus-Christ, même. Quoiqu’il l’entende dire tous les jours: «Tous ne pouvez pas servir Dieu et l’argent (Matth. VI, 32); quoiqu’on le menacé de l’enfer, quoiqu’on lui dise que ses tourments seront inévitables, il ne croit rien de ce qu’on lui dit; il ne se rend point à la vertu des paroles de Jésus-Christ, non parce qu’il est plus puissant que Jésus-Christ, mais parce que ce divin médecin ne nous guérit point malgré nous. Aussi quoique ces avares demeurent au milieu des villes, ils y sont néanmoins comme dans le fond « d’un désert. » Car quel est l’homme un peu raisonnable qui voulût demeurer avec eux? Pour moi, j’aimerais mieux vivre avec mille possédés, qu’avec un seul de ceux qui seraient frappés de cette horrible maladie : et il ne faut que considérer l’état des uns et des autres pour voir la vérité de ce que je dis.

Les avares considèrent comme leurs ennemis les personnes les plus innocentes. Ils sont prêts à rendre esclaves, s’ils le peuvent, les hommes libres, et à les accabler de tous les maux ; les possédés ne sont pas dangereux pour les autres, et le plus souvent ils ne sont malades que pour eux-mêmes.

Les avares renversent des familles entières; ils sont cause par leurs injustices qu’on blasphème le nom de Dieu : ils sont comme une (236) peste publique, qui dépeuple toute une ville, et qui répand sa contagion sur toute la terre. Les possédés ne causent point tous ces désordres et ces ravages. Au contraire, ils nous font compassion, et nous ne les pouvons voir sans verser des larmes. S’ils font quelque mal, c’est sans réflexion, et presque sans le savoir; mais les avares méditent leurs injustices, ils font le mal avec art et avec étude, et ils se livrent au milieu des villes à une sorte de manie furieuse, qui est accompagnée de lumière et de raison. Aussi tous les possédés ensemble pourraient-ils faire autant de mal qu’en a fait Judas qui est monté par son avarice jusqu’au comble de l’impiété? Tous ceux qui l’imitent dans sa passion pour les richesses sont comme des bêtes farouches qui rompent leurs liens, et qui viennent remplir les villes de confusion et de trouble sans que personne les puisse arrêter. On tâche de les retenir par de fortes chaînes, comme par la terreur du jugement, par la sévérité des lois, par la crainte de la haine et de l’aversion de tous les hommes, et par tout ce qui est capable de leur donner de l’effroi; mais ils brisent toutes ces chaînes, et ils portent le feu et le désordre partout. Si l’on supprimait ces salutaires entraves, on verrait alors combien le démon qui les agite est plus violent que ceux qui tourmentaient ces possédés dont il est parlé dans l’Evangile. Mais puisque cela ne se peut, supposons du moins que cela soit. Représentons-nous un avare dégagé de toute contrainte, et qui s’abandonne à sa fureur avec liberté. Je vous ferai voir une bête furieuse et un monstre horrible, mais ne craignez point, ce ne sera qu’une peinture, et non pas une vérité.

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