8.
Si vous désirez de voir des miracles, tâchez de vaincre en vous le péché, et vous verrez ce que Vous désirez. Car le péché, mes frères, est un démon, et un démon redoutable, Si vous le chassez de vous, vous faites un plus grand miracle que ne font les exorcistes lorsqu’ils chassent les démons des possédés. Ecoutez ce que dit saint Paul, et voyez combien il préfère la vertu à tous les miracles. « Désirez » dit-il, « entre les dons ceux qui sont les plus excellents, et je vous montrerai une voie qui « est encore beaucoup plus élevée au-dessus de tous ces dons. » (I Cor. XII, 31.) Expliquant ensuite quelle est cette « voie, » il ne parle ni de la résurrection des morts , ni de la guérison des lépreux, ni des autres miracles semblables, mais seulement de la charité. Considérez aussi ce que Jésus-Christ dit à ses apôtres : « Ne vous réjouissez pas de ce que les démons vous obéissent, mais réjouissez-vous plutôt de ce que vos noms sont écrits au ciel. » (Luc, IX, 21.) Et ailleurs : «Plusieurs me diront en ce jour-là : Seigneur, Seigneur, n’avons-nous pas prophétisé? n’avons-nous pas chassé les démons, et fait beaucoup de miracles en votre nom? Et je leur répondrai alors: je ne vous connais point. » (Matth. VII, 26.) Et lorsque, près de mourir sur la croix, il donne ses dernières instructions à ses apôtres, il leur dit: « On reconnaîtra que vous êtes mes disciples, » non pas si vous chassez
les démons, mais « si vous vous aimez l’un l’autre. » (Jean, XIII, 35.) Et un peu après : « C’est en cela, mon Père, qu’on reconnaîtra que vous m’avez envoyé, » non pas si mes apôtres ressuscitent les morts, mais « s’ils sont tous une même chose. » (Jean, XVII.)
Souvent les miracles ont peu servi à ceux qui les voyaient, et ont nui beaucoup à celui qui les faisait, en lui donnant des sentiments de complaisance et de vaine gloire. Mais on ne peut craindre ce mauvais effet de la bonne vie et de la vertu. Car la vertu sert à ceux qui la voient et encore plus à celui qui la pratique. Travaillez donc, mes frères, à bien vivre, et vos actions seront des miracles. Si, d’avare que vous étiez; vous devenez libéral, vous avez guéri une main desséchée qui ne pouvait s’étendre pour donner l’aumône. Si vous renoncez au théâtre, pour venir dans nos églises, vous avez guéri un boiteux, et vous l’avez fait marcher droit. Si vous éloignez vos yeux de la courtisane et de la femme d’autrui pour n’avoir plus à l’avenir que des regards chastes vous aurez rendu la vue à un aveugle. Si vous détestez ces chansons diaboliques pour ne chanter à l’avenir que nos cantiques spirituels, vous aurez fait parler un muet. Voilà les merveilles qui sont véritablement estimables. Voilà les miracles que je vous souhaite. En faisant ces oeuvres saintes et miraculeuses, nous deviendrons grands nous-mêmes, et nous servirons aux autres par notre exempté, nous les ferons passer d’une vie mauvaise à une vie sainte, et nous nous ouvrirons ainsi l’entrée du ciel, par la grâce et par la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui est la gloire, et l’empire dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.