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Works John Chrysostom (344-407) In epistula ad Romanos commentarius Commentaire sur l'épître aux Romains
HOMÉLIE II.

6.

O âme généreuse ! qui accepte une mission si pleine de périls, un voyage d'outremer, des tentations, des embûches, des séditions, (car en prêchant dans une si grande ville t dominée par l'impiété, il fallait s'attendre à d'innombrables épreuves : aussi y a-t-il fini sa vie, décapité par le tyran qui y régnait alors). Et cependant la prévision de tant de maux n'a nullement ralenti son zèle; il est pressé , il souffre les douleurs de l'enfantement, il est plein d'ardeur. Aussi leur dit-il : « Autant qu'il est en moi, le suis prêt à vous évangéliser, vous aussi qui êtes à Rome. Car je ne rougis point de l'Evangile... (16) ». Que dites-vous, Paul? Quand il faudrait dire : Je me félicite, je me glorifie, je suis fier, vous ne le dites pas; vous vous contentez de cette expression bien plus faible : « Je ne rougis point » , dont nous n'avons pas coutume de nous servir dans des cas aussi glorieux. Que dit-il donc? Pourquoi tient-il ce langage, bien qu'il se glorifie de l'Evangile plus que de la possession du ciel? ;Car il écrit aux Galates : « Pour moi , à Dieu ne plaise que je me glorifie, si. ce n'est dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ ». (Gal. VI, 14.)

Pourquoi ne dit-il pas ici : Je me glorifie, mais « Je ne rougis pas? » Les Romains étaient fort épris des choses de ce monde à cause de leurs richesses, de leur puissance, de leurs victoires, de leurs souverains qu'ils estimaient à l'égal des dieux, à qui même ils en donnaient le nom, jusque-là qu'ils les honoraient par des temples, des autels et des sacrifices. Comme c'était à des hommes ainsi enflés d'eux-mêmes que Paul devait prêcher Jésus, (202) celui qui était réputé le fils d'un artisan, qui avait été élevé en Judée dans la maison d'une humble femme, qui n'avait point de gardes, point de fortune, qui était mort comme un criminel entre des voleurs, et avait souffert beaucoup d'autres ignominies, et que vraisemblablement ils en rougiraient, eux qui ne savaient encore rien des grands mystères voilà pourquoi il se sert de ce terme : « Je ne « rougis pas », leur apprenant en même temps à ne point rougir eux-mêmes: bien convaincu que s'ils en venaient là, ils ne tarderaient pas à aller plus loin et à se glorifier aussi. Si donc jamais vous entendez quelqu'un vous dire : Tu adores le Crucifié? N'en rougissez pas, ne baissez pas les yeux, mais soyez-en glorieux et fier, et recevez le reproche, 1'œil serein et le front haut. Et s'il vous répète encore : Tu adores le Crucifié? Répondez-lui : Oui, et non un adultère, ni un parricide, ni un meurtrier de ses enfants, (car tels sont tous les dieux des païens) ; mais celui qui par sa croix a fermé la bouche aux démons et détruit leurs innombrables artifices. Car la croix est l'oeuvre d'un ineffable amour pour nous, la preuve d'une immense tendresse. De plus, comme ils se vantaient de leur éloquence, et s'enorgueillissaient de la sagesse profane : pour moi, leur dit Paul, ayant dit un éternel adieu à tous les raisonnements, je viens prêcher la croix, et n'en rougis point. « Parce qu'il est la vertu de Dieu pour sauver ». Parce qu'il est aussi la vertu de Dieu pour punir (en effet, quand Dieu punissait les Egyptiens, il disait Voilà l'effet de ma grande puissance), et encore la vertu pour détruire, (car il est écrit « Craignez celui qui peut précipiter l'âme et le corps dans l'enfer »). (Matth. X, 28.) C'est pourquoi Paul dit : Ce que j'apporte n'est point pour la punition ni pour le supplice, mais pour le salut.

Quoi donc? L'Evangile n'annonçait-il pas aussi tout cela, l'enfer, les ténèbres extérieures, le ver empoisonneur? Nous ne connaissons ces vérités que par l'Evangile. Pourquoi donc dit-il : « La vertu de Dieu pour sauver? » Mais écoutez ce qui suit : « Pour sauver tout croyant, le Juif d'abord, et puis le Grec » ; non pas tout le monde, mais seulement ceux qui croient. Fussiez-vous Grec, coupable de toute espèce de crimes, Scythe, Barbare, un monstre sauvage, chargé d'un poids de mille iniquités; dès l'instant que vous acceptez la doctrine de la croix et que vous êtes baptisé, tout est effacé. Mais pourquoi dit-il: « Le Juif d'abord et puis le Grec? » D'où vient cette différence? Il a pourtant dit souvent que la circoncision et l'incirconcision ne servent de rien ; pourquoi donc distingue-t-il ici et place-t-il le Juif avant le Grec? Oui, pourquoi cela? Car enfin pour être le premier, on ne reçoit pas une plus grande abondance de grâce : le même don est fait à l'un et à l'autre : le rang n'est ici qu'une simple affaire de préséance. L'avantage ne consiste donc pas dans une justice plus parfaite, mais dans l'honneur de la recevoir le premier. Lorsqu'on initie les catéchumènes à la lumière spirituelle, ils vont tous au baptême, mais non à la même heure : l'un est le premier, l'autre le second ; cependant le premier ne reçoit pas plus que le second, ni celui-ci que le suivant; tous jouissent du même avantage. Ainsi ce mot de premier est seulement un terme honorifique et n'implique point une grâce plus abondante. Ensuite après avoir dit « Pour sauver », il relève encore le don, en faisant voir qu'il ne se borne pas au temps présent, mais s'étend au-delà: ce qu'il exprime par ces mots : « La justice de Dieu, en effet, y est révélée par la foi et pour la foi, ainsi qu'il est écrit : Le juste vivra de la foi (17) ». Donc celui qui est devenu juste ne vivra pas seulement dans le siècle présent, mais aussi dans le siècle à venir.

Ce n'est pas tout : l'apôtre fait encore allusion à autre chose, à l'éclat et à la splendeur de cette autre vie. Et comme on peut être sauvé avec déshonneur, (ainsi qu'il arrive à ceux que la clémence royale exempte du châtiment), pour qu'on ne soupçonne rien de pareil, il ajoute : « Et la justice », non pas la vôtre, mais celle de Dieu : laissant entrevoir l'abondance de cette justice et. la facilité avec laquelle elle s'obtient, car ce n'est point par vos sueurs ni par vos travaux que vous l'obtenez, mais par un don d'en-haut, sans y rien apporter de votre côté que de croire. Puis , comme il semblait incroyable qu'un adultère, un libertin, un profanateur de tombeaux, un magicien, non-seulement fussent tout à coup exempts de punition , mais encore devinssent justes, et justes de la justice d'en-haut, il prouve sa proposition par l'Ancien Testament. Et d'abord il ouvre en peu de mots, à qui sait voir, le vaste océan de (203) l'histoire. Après avoir dit : « Par la foi et pour la foi », il renvoie son auditeur aux traits de Providence consignés dans l'Ancien Testament, qu'il a exposés avec beaucoup de sagesse dans son Epître aux Hébreux, et démontre que déjà alors les justes et les pécheurs étaient justifiés; c'est pourquoi il cite l'exemple de Rahab et d'Abraham. Ensuite, après cette simple indication, (car il est pressé de courir à un autre sujet), il prouve sa thèse par les prophètes, en produisant le témoignage d'Habacuc, qui s'écrie et dit que celui qui doit vivre ne peut vivre que par la foi. Car « le juste », dit-il en parlant de la vie à venir, «vivra de la foi ». En effet, puisque les dons de Dieu surpassent toute intelligence, la foi nous est évidemment nécessaire. Par conséquent l'incrédule, le dédaigneux et l'orgueilleux n'aboutiront à rien.

Que les hérétiques écoutent la voix de l'Esprit. Car telle est la nature des raisonnements c'est une sorte de labyrinthe, d'énigme, qui n'a point d'issue, ne permet point à la raison de s'établir sur la pierre, et prend son origine dans l'orgueil. Rougissant de se soumettre à la foi et de paraître ignorer les choses du ciel, ils se perdent dans le brouillard de mille pensées. Ensuite, ô mortel infortuné, misérable et digne d'une extrême pitié ! si l'on te demande comment le ciel et la terre ont été faits; que dis-je, le ciel et la terre? comment tu as été engendré, comment tu as été nourri, comment tu as grandi, tu ne rougis pas de ton ignorance; mais si on parle du Fils unique, tu te jettes dans un abîme de perdition, par honte, parce que tu crois indigne de toi de ne pas tout savoir? Ce qui est indigne, c'est de discuter et de raisonner hors de propos. Mais pourquoi parler de dogmes? Nous ne pouvons même échapper aux misères de la vie présente que par la foi. Car c'est par elle qu'ont brillé tous ces hommes illustres, Abraham, Isaac, Jacob; par elle la prostituée a été sauvée et dans l'Ancien et dans le Nouveau Testament. « C'est par la foi », est-il écrit, « que Rahab, femme de mauvaise vie, ne périt point avec les incrédules, ayant reçu pacifiquement les espions ». (Héb. XI, 31.) Elle ne s'est point dit : Comment ces prisonniers, ces fuyards, ces émigrants, ces vagabonds, triompheront-ils de nous qui avons une ville, des remparts et des tours? Si elle se fût tenu ce langage, elle se serait perdue avec les autres, comme avaient fait les ancêtres des espions qui étaient sauvés ce jour-là. Car voyant des hommes de haute taille, ils désespérèrent et périrent sans combat, sans coup férir. Voyez-vous quel abîme c'est que l'impiété, et quel rempart c'est que la foi? L'une a détruit d'innombrables multitudes, et l'autre a non-seulement sauvé une femme de mauvaise vie, mais en a fait la protectrice d'un grand peuple.

Instruits de ces choses et de beaucoup d'autres, ne demandons jamais compte à Dieu des événements, mais acceptons tout ce qu'il ordonne, et ne raisonnons jamais, ne discutons jamais, quand même ses ordres sembleraient absurdes à la sagesse humaine. Qu'y a-t-il, dites-moi, de plus absurde en apparence que de commander à un père d'immoler son fils unique? Et pourtant le juste qui recevait cet ordre, ne le discuta point, mais l'accepta et le remplit, par égard pour celui qui l'avait donné. Un autre qui avait reçu de Dieu l'ordre de frapper un prophète, trouva le commandement absurde et fut frappé de mort pour ne l'avoir point accompli, tandis que celui qui l'exécuta fut agréé de Dieu. Et Saül, pour avoir épargné des hommes contre l'ordre de Dieu, perdit la couronne et souffrit des douleurs insupportables. On pourrait citer bien d'autres exemples qui nous apprendraient qu'il ne faut jamais demander à Dieu raison de ses ordres, mais y céder et obéir. Que s'il est dangereux de discuter ce que Dieu commande, et si le dernier supplice en est la punition, comment s'excuseront un jour ceux qui essaient de scruter des mystères beaucoup plus profonds, beaucoup plus terribles, par exemple, comment et par quel procédé Dieu engendre son Fils, quelle est sa substance? Convaincus de ces vérités, accueillons avec la meilleure volonté possible la foi, source de tous les biens, afin que, naviguant comme en un port tranquille, nous conservions les saines croyances, et que, réglant notre vie en toute sécurité, nous obtenions les biens éternels, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec qui appartiennent au Père la gloire, la puissance, l'honneur et l'adoration, en même temps qu'au Saint-Esprit, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

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