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C'est, Dieu lui-même qui invite les hommes, a dit l'apôtre; et les apôtres sont les ambassadeurs de Dieu; en son nom ils les pressent de rentrer en grâce avec le Seigneur. De peur que les Corinthien; ne tiennent, à se relâcher encore, il leur inspire de nouveau un sentiment de crainte ; « Ne recevez donc pas en vain la grâce de Dieu». De. ce que Dieu nous prie lui-même et nous. envoie ses ambassadeurs, ce n'est pas un motif pour nous de vivre dans l'indolence; nous n'en devons avoir que plus d'ardeur et de zèle pour plaire à Dieu et pour faire provision de richesses spirituelles. (C'est ce que l’apôtre disait plus haut : « La charité de Dieu nous presse », c'est-à-dire nous pousse, nous excite.) Après tant de preuves de bonté de la part de Dieu, gardons-nous de tomber et de perdre l'effet de si nombreuses grâces, en ne montrant aucune générosité. Il nous envoie maintenant ses lieutenants pour nous exciter au bien; mais cette miséricorde aura un terme : ce sera le second avènement de Jésus-Christ; après cela viendra la condamnations et les supplices. C'est pourquoi l'apôtre dit : Noirs sommes presse. Ce n'est pas seulement par la vue de si grands Biens, par la pensée de la bonté de Dieu ,qu'il excite les fidèles, mais aussi par la considération du peu de durée de la vie. Ailleurs il dit : « Notre salut est maintenant plus proche» (Rom. XIII, 11); et encore : « Le Seigneur est proche ». (Phil. IV, 5.)
Ici il fait quelque chose de plus. Ce qui doit les animer, c'est que non-seulement la vie est courte, mais une fois le temps de la vie écoulé, le salut devient impossible. « Voici », leur dit-il, « voici le temps favorable, voici les jours de salut ». Ne les laissons donc point passer inutiles, mais que notre zèle réponde aux grâces que nous avons reçues. Si nous mettons nous-mêmes tant d'empressement à vous prêcher l'Evangile, c'est que bous songeons au peu de durée d'une vie si précieuse. Telle est le sens de ces paroles : « En qualité d'auxiliaire nous vous exhortons ».C'est vous que nous aidons, plutôt que Dieu, dont nous sommes les ambassadeurs. Dieu ne manque de rien, le salut est tout à votre avantage. L'apôtre ne craint pas non plus de s'appeler l'auxiliaire du Seigneur, car ailleurs il dit : « Nous sommes les auxiliaires de Dieu »..C'est de cette manière qu'il contribue au salut des hommes :. « Nous vous exhortons ». Dieu ne se contente pas d'une simple exhortation, mais il l'appuie des motifs les plus puissants : il a donné son fils; l'innocence même, son fils qui ne connaissait point le péché; il l'a fait « péché » pour nous qui. étions pécheurs, afin de nous rendre justes à ses. yeux. Et ce Jésus qui est Dieu, ce n'est pas lui qui devrait prier les (78) hommes coupables de tant d'offenses; ce sont les hommes qui devraient le prier. Néanmoins c'est lui qui les prie. Pour nous, quand nous vous prions, nous ne pouvons mettre en avant aucun droit, aucun bienfait : c'est au nom du Dieu qui vous a comblés de grâces que nous vous prions. Nous vous conjurons donc de recevoir le bienfait qui vous est offert; de ne pas refuser. ce présent de la part de Dieu. Obéissez-nous donc et prenez garde de ne pas recevoir en vain la grâce de Dieu..
En effet, l'apôtre ne veut pas qu'ils s'imaginent que la foi leur suffit pour être réconciliés ; il leur demande avec la foi le zèle dans leur conduite. Si après s'être vu délivré de ses péchés, après être devenu l'ami de Dieu, on le plonge, de nouveau dans ses anciens désordres, on redevient ennemi de Dieu, et la grâce de Dieu ne sert de rien désormais pour la vie éternelle. A quoi peut en effet servir la. grâce du baptême, si nous vivons dans l'impureté ? Au contraire, elle nous devient funeste, elle aggrave nos fautes, puisque nous retournons à .nos péchés après avoir connu Jésus-Christ et après à voir joui de ses dons. Mais cette pensée, il ne l'exprime pas tout de suite, pour ne pas tenir un langage par trop rebutant ; il se borne à dire qu'il ne nous en revient aucun avantage. Il rappelle ensuite les paroles du prophète, pour les exciter. davantage à mettre la main à l'oeuvre de leur salut. Car le prophète a dit : « Je vous ai exaucés en temps favorable, et je vous suis venu en aide au jour du salut. « Voici maintenant un temps favorable, voici maintenant des jours de salut ». Un temps favorable, quel est-il donc? Le temps du bienfait et de la grâce, temps où l'on né demande pas compte des fautes commises, où l'on ne subit point de châtiment, mais où après avoir été réconcilié avec Dieu, on jouit de biens sans nombre, la justice, la sainteté, et tant d'autres faveurs. Quels travaux ne s'imposerait-on point pour trouver une occasion aussi précieuse ? Et voici que, sans effort de notre part, elle s'offre à nous et nous apporte la rémission de toutes nos fautes passées. C'est pourquoi l'apôtre appelle ce temps un temps favorable; car il accueille les plus criminels, et non-seulement il les accueille; mais il les élève au sommet des honneurs. C'est ainsi que l'arrivée de l'empereur annonce non pas un jugement, mais des bienfaits. et le salut; voilà le temps que l'apôtre appelle un temps favorable : c'est le temps où nous sommes dans la carrière, où nous cultivons la vigne, c'est en un mot la onzième heure, comme dit l'Evangile.