1.
L'apôtre, après avoir traité des évêques et les avoir caractérisés, et énoncé les qualités qu'ils doivent avoir et ce dont ils doivent être exempts, passe sous silence l'ordre des prêtres et arrive immédiatement aux diacres. Pourquoi cela? C'est qu'entre les évêques et les prêtres la différence n'est pas grande. C'est que les prêtres ont été institués pour enseigner et pour avoir autorité dans l'église; ce qu'il a dit des évêques s'applique aussi aux prêtres. Ce n'est que par l'ordination que les premiers sont montés plus haut; c'est par là seulement qu'on leur voit un avantage sur les prêtres. — « De même des diacres », il leur demande les mêmes vertus. Et comment les mêmes? D'être irréprochables, prudents, hospitaliers, doux, pacifiques, désintéressés. « Pudiques, sincères », c'est-à-dire, sans vice caché, sans artifices; car rien ne produit la bassesse de l'âme autant que l'artifice, et rien n'est fâcheux dans l'Eglise comme un vice caché. — « Qui ne soient adonnés ni au vin à ni à des profits honteux, et gardent le mystère de la foi dans une conscience pure ». Vous le voyez, il a exprimé ce que c'est qu'être irréprochable. Voyez aussi comment il introduit ici l'idée : « Qu'il ne soit pas néophyte ». Car il ajoute : « Et qu'ils soient d'abord éprouvés»; en sorte que, ce qu'il a exprimé en parlant de l'évêque, il le répète par cette phrase conjonctive, qui ne laisse pas d'idée intermédiaire. Il fait donc entendre là aussi « Qu'il ne soit pas néophyte ». Ne serait-il pas étrange en effet que, dans une maison, l'on ne confie pas le service intérieur à un esclave nouvellement acheté, avant qu'il ait donné, par une expérience répétée, des preuves de son intelligence, et que, dans l'église de Dieu, celui qui arrive du dehors fût immédiatement admis dans les premiers rangs?
« Que de même les femmes », il parle des diaconesses, « soient pudiques, innocentes de calomnie, sobres, fidèles en toutes choses (11) ». Quelques-uns pensent que l'apôtre parle des femmes en général, mais il n'en est point ainsi ; comment, en effet, eût-il inséré dans ce qu'il dit ici des préceptes concernant les femmes? Il parle de celles qui possèdent la dignité de diaconesses. « Que les diacres ne soient maris que d'une seule femme 1 (12) ». Vous le voyez, il demande d'eux aussi cette vertu. Car, s'ils ne sont pas égaux en dignité à l'évêque, ils doivent, comme lui, être irréprochables et purs. « Qu'ils gouvernent bien leurs enfants et leurs maisons. Car les diacres qui auront, bien rempli leur charge, obtiendront un rang honorable et une grande confiance dans la foi en Jésus-Christ (12, 13) ». Partout il parle du gouvernement des enfants, afin d'éviter au peuple le scandale qui résulterait de cet objet. « Car », dit-il, « les diacres qui auront bien rempli leur charge, obtiendront un rang honorable » , c'est-à-dire un rang plus élevé, « et une grande confiance dans la foi ». Ceux qui se seront montrés vigilants dans une charge inférieure arriveront promptement aux plus hautes, dit-il.
« Je vous écris ces choses, quoique j'espère me rendre promptement auprès de vous; afin que, si je tarde, vous sachiez comment il faut vous conduire dans la maison de Dieu, qui. est l'Eglise du Dieu vivant, la colonne et le fondement de la vérité (14,15) », Craignant que son disciple ne se décourage à la pensée de régler lui-même tout cela, il ajoute que, s'il écrit, ce n'est pas qu'il n'ait point l'intention de venir, et qu'il viendra, mais pour que, s'il tarde, Timothée ne se chagrine pas. Il lui adresse donc cette épître pour le sauver du découragement, il l'envoie aussi, pour en réveiller d'autres et les rendre plus zélés ; car l'annonce de son arrivée avait un grand pouvoir. Et ne vous étonnez pas si, prévoyant l'avenir par inspiration, il s'en montre ignorant par ces paroles : « J'espère venir, mais si je tarde », paroles qui conviennent à celui qui ignore. Car, puisqu'il était conduit par l'inspiration et n'agissait point par son sentiment propre, il devait ignorer cela. « Afin que vous sachiez », dit-il, « comment il faut vous conduire dans la maison de Dieu, qui est l'Eglise du Dieu vivant, la colonne et le fondement de la vérité»; ce n'est plus là le temple juif. Ces paroles comprennent la foi et la prédication; car la vérité est la colonne et le fondement de l'Eglise.
« Et sans contredit », ajoute-t-il, «c'est quelque chose de grand que ce mystère d'amour. Dieu a été manifesté dans la chair, justifié dans l'Esprit (16) ». C'est là l'économie de notre salut, c'est-à-dire, l'incarnation. Ne me parlez pas des clochettes (Exod. XXVIII), du Saint des saints, ni du grand prêtre : la colonne du monde, c'est l'Eglise. Méditez ce mystère et vous tremblerez. C'est un mystère, un mystère de piété, sans contredit, et non comme un problème à résoudre, car il n'y a point là de doute. Il n'a, en traitant du sacerdoce, donné aucune de ces règles qu'on voit dans le Lévitique, mais il élève la pensée vers un autre sujet, savoir que l'Auteur du monde a été manifesté dans la chair. « Il a été vu dans la chair», dit-il, « et justifié dans l'Esprit». L'apôtre veut ici ou rappeler cette parole: «Et la sagesse a été justifiée par ses enfants » (Matth. XI, 19), ou exprimer que le Christ. n'a point commis de fraude, ce que le Prophète exprime en disant : « Qui n'a point, commis de péché; et la fraude ne s'est point trouvée dans sa bouche ». (Is. LIII, 9.) « Il a été vu par les anges ». Ainsi les anges n'ont vu qu'avec nous le Fils de Dieu : ils ne le voyaient pas auparavant. Vraiment, c'est là un grand mystère. « Il, a été annoncé aux nations , il a été, cru dans le monde ». Partout sur la terre' on a entendu et cru cet enseignement; ne pensez pas que ce ne soient , là que de vaines paroles. « Il a été élevé dans la gloire. celui que vous voyez élevé au ciel». (Act. I, 11.) « Les anges s'approchèrent et ils le servaient ». (Matth. IV, 11.) « Dans toute la terre le bruit s'en est fait entendre ». (Ps. XVIII, 5.) « Il a été élevé dans la gloire », sur les nuées.
Considérez, je vous prie, la sagesse du bienheureux apôtre. Lorsqu'il a voulu avertir ceux, qui sont jugés dignes du diaconat de ne pas se gorger de boisson, il ne leur a pas dit de ne pas s'enivrer,. mais de ne pas être adonnés au, vin. Car si ceux qui entraient dans le temple, n'en goûtaient point, combien plus ceux-ci doivent-ils s'en abstenir. Le vin trouble, en effet, même sans conduire jusqu'à l'ivresse; la vigueur de l'âme se détend, l'harmonie des facultés est détruite. Voyez comment l'apôtre appelle toujours mystère, l'incarnation, et c'est avec raison, car elle n'est visible ni pour les regards des hommes ni pour ceux mêmes des anges; et comment l'eût-elle été puisqu'elle s'est manifestée par 1'Eglise ? C'est pour cela qu'il dit : u Sans contredit c'est un grand « mystère ». Oui, c'en est. un grand qu'un homme soit Dieu et qu'un Dieu soit homme; homme, il a été vu sans péché ; homme, il s'est élevé au ciel et a été prêché, dans le monde; les anges l'ont vu avec nous. C'est donc un mystère. Ne le divulguons point, ne l'exposons point en toute occasion, mais me. nous une vie qui en soit digne. Ceux à qui les mystères sont -confiés sont grands. Si l'empereur nous confiait un secret, dites-moi, ne (315) nous témoignerait-il pas ainsi une grande amitié? Maintenant Dieu nous a confié ce mystère. Et comment, direz -vous, appeler mystère ce que tous connaissent? Non, certes, tous ne le connaissent pas. On l'ignorait avant qu'il fût révélé, et c'est maintenant qu'il a été manifesté aux hommes.
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Il convient de l'entendre aussi des diaconesses, car c'est une chose bien nécessaire, profitable et conforme à la régularité des moeurs « que les diacres ne soient maris que d'une seule personne ». ↩