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L'apôtre aime à prouver ou à confirmer sur sa route bien des vérités qu'il sème en passant, découvrant dans le texte sacré mille sens imprévus. Telle est, en effet, la parole de l'Esprit-Saint, qu'elle ne contient pas seulement quelques sens sous une multitude de mots, mais qu'au contraire, sous très-peu de mots elle prête à des interprétations nombreuses et magnifiques. Dans cette étude en forme d'exhortation sur la foi, par exemple, saint Paul nous montre une figure, un mystère, dont la loi de Jésus-Christ possède la vérité. Il dit « C'est par la foi que Moïse célébra la Pâque et qu'il fit l'aspersion du sang de l'agneau, afin que l'ange qui tuait tous les premiers-nés, ne touchât point aux Israélites ». Quel est ce sang répandu? Dans chaque maison, un agneau tombait sous le couteau du sacrifice, et son sang marquait chaque porté et détournait la mort qui moissonnait les Egyptiens. Si donc le sang de l'agneau sauvait les Juifs au milieu même des Egyptiens et d'un fléau si redoutable, combien plutôt serons-nous préservés par le sang de Jésus-Christ qui doit rougir, non plus nos portes, mais nos coeurs. Encore aujourd'hui, en effet, celui qui dévaste et qui tue, ne cesse de circuler au milieu de cette nuit du siècle : armons-nous donc de ce sacrifice tutélaire. Notre onction est appelée par Moïse effusion. Car, nous aussi, nous avons été, par la main de Dieu, tirés de l'Egypte, des ténèbres, de l'idolâtrie. Le rite mosaïque n'était rien en lui-même ; mais son effet était grand, puisqu'il sauvait si bien et si parfaitement un grand peuple. Le rite mosaïque n'était qu'une effusion de sang; l'effet grand et parfait produisait le salut et la vie, et posait à la mort une défense et un obstacle. L'ange exterminateur craignit le sang, parce qu'il savait de quel autre sang il était la figure ; il recula effrayé à l'idée de la mort du Seigneur; et voilà pourquoi il ne touchait pas les portes marquées de ce signe. Moïse leur avait dit : Faites cette marque, et ils la firent, et ils y trouvèrent confiance et sûreté. Et vous, qui avez le sang du véritable Agneau, vous n'avez pas confiance ?
« C'est par la foi qu'ils passèrent la mer Rouge, comme sur une terre sèche ». Paul de nouveau compare un peuple avec un peuple, afin que les Hébreux ne disent pas : Nous ne pouvons être comme les saints. « Par la foi donc, ils passèrent la mer Rouge comme sur une terre sèche, tandis que les Egyptiens ayant essayé ce passage, périrent engloutis dans les flots (29) ». Paul leur remet en mémoire les souffrances de leurs aïeux en Egypte. Pourquoi parle-t-il de lafoi de ceux-ci? C'est qu'en effet ils ont espéré, ils ont demandé avec prières, à Dieu, de passer ainsi la mer Rouge; ou pour mieux dire, Moïse a prié en ce sens. Voyez-vous comme la foi surpasse toujours les forces humaines, c'est-à-dire notre faiblesse, notre bassesse? Voyez comme les Israélites avaient en même temps et la foi et la crainte des fléaux meurtriers; ce sang imprimé à chaque porte et ce passage de la mer Rouge vous le démontrent assez. Au reste cette eau de la mer Rouge fut une affreuse vérité, et non pas une vision, comme le prouva la mort de ces ennemis qui y périrent noyés C'est ainsi que les exécuteurs dévorés eux-mêmes par les lions, et ceux qui furent brûlés près de la fournaise , donnaient une preuve de la vérité de ces drames affreux, et vous démontraient, comme au cas présent, que tel châtiment sauvait et glorifiait les uns, tandis qu'il donnait aux autres une mort affreuse. Telle est, au reste, la puissance bienfaisante de la foi : c'est quand nous sommes arrivés à la dernière extrémité, de sorte qu'on ne voit plus d'issue possible, c'est à cet instant même que nous sommes délivrés, quand même nous serions aux portes de la mort, quand même notre sort semblerait désespéré et que tout semblerait perdu sans remède. Quel espoir restait aux Juifs? Peuple désarmé, serrés entre les Egyptiens et la mer, il leur fallait ou se noyer dans la fuite en avant, ou retomber en arrière dans les mains des Egyptiens; et la foi les délivra et les sauva dans ces circonstances de perplexité et d'angoisses. Polir eux, la mer devint comme une route sur le continent; tandis qu'elle engloutit et dévora les Egyptiens dans ses abîmes. Pour les premiers elle oublia sa nature; (565) pour les seconds elle s'armait comme un ennemi.