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Saint Paul s'attache maintenant à démontrer combien le Nouveau Testament est préférable à l'Ancien, combien il lui est supérieur, et il commence par exposer les raisons sur lesquelles il se fonde. Sous la loi nouvelle, rien ne parle aux sens, il n'y a pas de représentation matérielle . point (487) de temple, point de saint des saints, point de prêtre revêtu de l'appareil sacerdotal, point de cérémonies légales; tout est plus élevé, tout est plus parfait. Rien pour le corps; tout pour l'esprit. Or, ce qui est du ressort de l'esprit ne frappe pas les âmes. faibles comme ce qui parle"aux sens; voilà pourquoi l'apôtre tourne et retourne son sujet de mille manières. Voyez combien il est habile. Il nous représente d'abord le Christ comme prêtre, il ne cesse de lui donner le nom de pontife; et il part de là pour nous montrer combien il différé des autres pontifes. Il donne la définition du. prêtre , il nous montre les caractères et les symboles du sacerdoce réunis dans la personne du Christ. Ce. qu'on pouvait lui objecter, ce qui lui faisait obstacle, c'est qu'il n'était ni d'une haute naissance, ni d'une tribu sacerdotale, ni revêtu d'un sacerdoce terrestre. On pouvait donc craindre d'entendre sortir de quelques bouches cette question : Comment se fait-il qu'il soit prêtre? Eh bien ! Paul procède ici comme dans l'épître aux Romains. (Rom. IV.) Il s'était chargé de soutenir une thèse difficile;.il fallait prouver que la foi opère des effets que n'ont pu opérer la loi, ni, toutes les peines et tous les travaux qu'elle imposait. Pour montrer que cet effet d'est produit et qu'il pouvait se produire, il a recours à l'exemple des patriarches et il remonte aux temps anciens. C'est ainsi ! qu'il entre dans la seconde voie suivie par le sacerdoce, en citant d'abord les anciens pontifes. De même qu'à propos des peines infligées aux méchants, Il a cité .à ses auditeurs non-seulement la géhenne, mais encore l'exemple de leurs pères; de même ici il commence par leur rappeler les faits présents à leur mémoire. Au lieu de leur montrer le ciel, pour les faire croire aux choses terrestres, il fait le contraire, en considération de leur faiblesse. Il expose d'abord les points de contact que le Christ peut avoir avec les autres pontifes, pour montrer ensuite la supériorité qu'il a sur eux. La comparaison est donc à l'avantage du Christ; puisque sous certains rapports, il y a ressemblance et. affinité entré eux et lui, tandis que sous d'autres points de vue, il leur est supérieur. Autrement, à quoi aboutirait cette comparaison?
«Tout pontife pris d'entre-les hommes ». Voilà une condition qui se rencontre dans le Christ, comme dans les autres. « Est établi pour les hommes, en ce qui tient au culte de Dieu». Même observation. « Afin qu'il offre des dons et des sacrifices pour le peuple ». Cela est encore; jusqu'à un certain point, commun au Christ et aux autres. Mais il n'en est pas ainsi du reste: «Afin qu'il puisse étire touché de compassion pour ceux qui sont dans l'ignorance et terreur». Voilà déjà un avantage que le Christ a sur les autres pontifes. « Comme étant lui-même environné de faiblesse, et c'est ce qui l'oblige à offrir le sacrifice de l'expiation des péchés, aussi bien pour lui-même que pour « le peuple».Puis il ajoute: Il a reçu le pontificat, mais-il ne s'est pas fait lui-même pontife. Il a encore cela de Commun avec lies, autres pontifes. « Nul ne s'est attribué à soi-même cet honneur; mais il faut y être appelé de Dieu comme Aaron,(4) ». Ici c'est autre chose qu'il s'applique à démontrer, il fait voir que le Christ est l'envoyé de Dieu. C'est ce que le Christ ne cessait de dire, en conversant avec les juifs : «Celui qui m'a envoyé est plus grand que, moi». (Jean VIII, 42.) Et ailleurs : « Je ne suis pas venu dé moi-même ». Selon moi, ces paroles font allusion aux pontifes juifs qui envahissaient le sacerdoce au mépris de la loi. « Ainsi Jésus-Christ ne s'est pas élevé de lui-même à la dignité de souverain pontife (5) ».Quand donc a-t-il été institué et ordonné pontife? Aaron, .en effet, a été souvent institué et ordonné pontife, par la verge, par le feu du ciel, qui consuma ceux qui voulaient lui ravir le sacerdoce. ici, rien de pareil : non-seulement il n'est pas arrivé malheur aux faux pontifes, mais ils sont en bonne odeur. Comment donc saint Paul. prouve-t-il l'ordination de Jésus-Christ? Par les prophéties. Son pontificat n'a rien de matériel et ne tombe pas sous les sens. Ce qui prouve sa dignité de pontife, ce sont les prophéties, la prédiction de ce qui devait arriver, « c'est celui qui lui a dit : Vous êtes mon Fils, je vous ai engendré aujourd'hui ». Ces paroles se rapportent-elles au Fils de Dieu? Sans doute, c'est de lui qu'il s'agit ici. Mais quel rapport ces paroles ont-elles avec la question qui nous occupe? Elles en ont un très-grand. C'est la démonstration anticipée qu'il a été institué et ordonné pontife par Dieu même.
Selon qu'il lui dit aussi dans un autre endroit; «Vous êtes le pontife selon l'ordre de Melchisédech (6) ». A qui s'appliquent ces paroles? Quel est ce pontife qui est selon l'ordre de Melchisédech? Nul autre que le Christ. Tous en effet étaient soumis à là loi; tous observaient le sabbat; tous étaient circoncis. Il ne peut être ici question que du Christ. « Ainsi, durant les jours de sa chair, ayant offert avec un grand cri et avec des larmes, ses prières et ses supplications à celui qui pouvait le tirer de la mort, il a été exaucé à cause de son humble respect pour son Père (1). Et, quoiqu'il fût le Fils. de Dieu, il n'a pas cessé d'apprendre l'obéissance par ce qu'il a souffert (8) ». Voyez-vous comme l'apôtre s'applique uniquement à montrer la sollicitude et la haute charité du Christ pour les bommes? Quel est-le sens de ces mots : «Avec un grand cri?» On ne trouve nulle part dans l'Evangile qu'il ait adressé cette prière les larmes aux yeux et en poussant de grands cris : Mais ne voyez-vous pas que saint Paul descend ici jusqu'à nous, jusqu'à notre faible intelligence? Il ne lui suffit pas de nous montrer le, Christ en prières; il nous le montre poussant de grands cris. .«Et il a été exaucé», dit-il, « à cause de son humble respect pour son Père; quoiqu'il fît le Fils de Dieu, il n'a pas laissé d'apprendre l'obéissance par ce qu'il a souffert. Et étant entré dans la consommation de sa gloire, il est devenu l'auteur du salut éternel pour tous ceux qui lui obéissent (9). Dieu l'ayant déclaré pontife, selon l'ordre de Melchisédech (10) ». Il a offert ses prières avec des cris, soit : mais pourquoi avec de grands cris? Il les a même offertes en versant des larmes, dit-il, et il a été exaucé à causé de son respect pour son Père. Qu'ils rougissent, les hérétiques qui nient la réalité de l'Incarnation ! Que dites-vous? Quoi ! (488) le Fils de Dieu était exaucé à cause de son respect? Que direz-vous de plus, en parlant des prophètes? Et n'est-ce pas une inconséquence, lorsqu'on a dit « Il a été exaucé à cause de son respect », d'ajouter ces paroles : « Quoiqu'il fût le Fils de Dieu, il n'a pas laissé d'apprendre l'obéissance par tout ce qu'il a souffert». Peut-on tenir un pareil langage, en parlant de Dieu? Qui serait assez insensé pour cela? Où trouver un homme qui aurait assez peu de raison pour parler ainsi? « Il a été exaucé à cause de son respect, il a appris l'obéissance par tout ce qu'il a souffert». Quelle obéissance?' Il avait appris, jusqu'à en mourir, l'obéissance qu'un fils doit à son père? Avait-il donc besoin de faire encore l'apprentissage de l'obéissance?