VII.
Mais pour quiconque pèse mûrement ces paroles : « Allez au feu éternel », la preuve qu'elles désignent au contraire une chose qui n'a pas de fin, se trouve précisément dans ce même endroit de l'Evangile touchant la vie éternelle que les justes doivent recevoir : car celle-ci non plus ne doit pas finir. Voici la conclusion de ce passage : « Ceux-là iront dans les flammes éternelles, et les justes dans la vie éternelle1 ». Le texte grec porte deux fois aionion. Or, si la miséricorde nous porte à croire que le supplice des impies ne sera pas sans lin, que croirons-nous touchant la récompense des justes, puisque l'éternité est exprimée dans l'un et l'autre cas, au même endroit, dans la même sentence et par le même mot? Dirons-nous que les justes eux-mêmes doivent de nouveau tomber de cet état de sainteté, de cette vie éternelle, dans la souillure du péché et dans la mort? Ah ! loin de la pureté de la foi chrétienne un pareil langage !
Le supplice comme la récompense est donc appelé éternel, parce qu'il n'aura point de fin, c'est-à-dire aionia : de peur qu'en compatissant aux souffrances du démon, nous ne doutions du règne de Jésus-Christ. Enfin, si l'Ecriture emploie ordinairement aeternum et aeternale, c'est-à-dire aion et aionion, dans l'un et l'autre sens, tantôt avec une fin, tantôt sans aucune fin, que répondrons-nous au sujet de ces paroles qu'un Prophète a écrites : « Leur ver ne mourra point et leur feu ne s'éteindra pas2? » Quelle que soit la peine désignée sous les noms de ver et de feu, si l'un ne doit point mourir, si l'autre ne doit pas s'éteindre, il est donc certain qu'elle a été prédite comme ne devant pas avoir de fin : car le Prophète, en s'exprimant ainsi ; n'avait d'autre but que de la prédire comme ne devant pas finir.