XLIV - INNOCENT
[1] Ce qui concerne le bienheureux Innocent, prêtre d'Olivet, tu l'as entendu dire par beaucoup; mais tu n'entendras non plus rien moins de nous qui avons vécu trois ans avec lui. Il était très simple, jusqu'à l'extrême. Or ayant été parmi les dignitaires du palais dans les débuts de l'empereur Constance, il renonça au monde en sortant du mariage, où il avait même un fils du nom de Paul, de la maison militaire. [2] Celui-ci ayant péché envers la fille d'un prêtre, Innocent maudit son propre fils, ayant supplié Dieu en disant ceci : « Seigneur, donne-lui un esprit tel que sa misérable chair ne trouve plus le temps de pécher. » Il pensait qu'il était meilleur pour celui-là de lutter contre un démon que contre l'intempérance. Et c'est ce qui arriva. Encore maintenant, il est sur la montagne des Oliviers, portant des fers et châtié par l'esprit. [3] Combien compatissant d'une part fut cet Innocent, je serai considéré comme un radoteur en racontant la vérité, au point que souvent il volait aux frères et donnait à ceux qui étaient dans le besoin. D'autre part, il fut extrêmement innocent et simple et il fut jugé digne d'un don contre les démons. Entre autres, une fois, lui fut apporté sous nos yeux un jeune garçon pris par un esprit et de la paralysie, de sorte que moi l'ayant vu, je voulus publiquement repousser la mère de celui qui était amené; je désespérais de la guérison. [4] Or il arriva que le vieillard, étant venu sur ces entrefaites, la vit se présenter à lui, pleurer et se lamenter sur l'infortune inénarrable de son fils. Alors le beau vieillard ayant pleuré et s'étant ému jusqu'aux entrailles, prit le jeune garçon et entra dans son oratoire qu'il avait bâti lui-même, où reposent des reliques de Jean-Baptiste. Et ayant prié pour lui depuis l'heure de tierce jusqu'à l'heure de none. il rendit le jeune garçon en santé à sa mère, le même jour, après avoir chassé sa paralysie et son démon. Et telle était sa paralysie qu'en crachant l'enfant crachait sur son dos, tant il était déjeté.
[5] Une vieille femme, ayant perdu une brebis, vint à lui en pleurant. Et l'ayant suivie, il dit : « Montre-moi l'endroit où tu l'as perdue. » Elle l'emmène dans les parages autour de Lazarium. Alors, debout, il se mit en prière. Cependant les jeunes gens qui avaient dérobé celle-là. ayant pris les devants, regorgèrent. Or pendant qu'il priait, personne n'avouant et la viande ayant été cachée dans le vignoble, un corbeau vint de quelque endroit se poser et ayant pris un morceau s'en retourna ensuite. Et le bienheureux, l'ayant remarqué, trouva la bête immolée. Et ainsi les jeunes gens, étant tombés à ses pieds, avouèrent qu'ils l'avaient égorgée et on leur réclama le prix que cela valait.