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De l'âme
XLV.
Nous sommes contraints ici d'exprimer l'opinion des Chrétiens sur les songes, attendu qu'ils sont les accidents du sommeil, et les élans non médiocres d'une âme que nous avons déclarée toujours occupée et agissante par la perpétuité du mouvement, ce qui est une preuve de sa divinité et de son immortalité. Ainsi, lorsque le repos arrive pour les corps, dont il est le soulagement spécial, l'âme, dédaignant un soulagement qui lui est étranger, ne se repose pas, et si le ministère des membres corporels lui manque, elle se sert des siens. Figure-toi un gladiateur sans armes, ou un cocher sans char, reproduisant, par leurs gestes, les habitudes et les efforts de leur art: quel combat! quelle rivalité! Toute cette agitation est vaine; il leur semble néanmoins qu'elle est vraie, quoiqu'elle n'ait rien de vrai. Il y a là des actes, mais pas d'effets. Nous appelons du nom d'extase cette puissance par laquelle l'âme est emportée ailleurs, comme dans une sorte de démence. Ainsi, à l'origine de la création, le sommeil fut consacré avec l'extase. « Et Dieu envoya l'extase à Adam, et il s'endormit. » Le sommeil, en effet, amena le repos du corps; l'extase, au contraire, envahit l'âme pour l'arracher au |90 repos: de là le sommeil mêlé ordinairement à l'extase, et la nature de l'extase formée sur celle d'Adam. D'ailleurs, nos songes nous réjouissent, nous attristent, nous épouvantent; avec quelle douceur! avec quelle anxiété! avec quelle torture! tandis que de fantastiques imaginations ne nous troubleraient aucunement, si nous étions maîtres de nous-mêmes pendant que nous rêvons. Enfin, les bonnes œuvres sont inutiles dans le sommeil, et les fautes ont leur sécurité, puisque nous ne serons pas plus condamnés pour un fantôme de volupté, que couronnés pour un fantôme de martyre.
Et comment, me diras-tu, l'âme se souvient-elle de ses songes, puisqu'elle ne peut avoir la conscience de ses opérations? Telle sera la propriété de cette démence, parce qu'au lieu de provenir de la maladie, elle a sa raison dans la nature; car elle ne bannit pas l'esprit, elle le détourne. Autre chose est renverser, autre chose mouvoir, autre chose est détruire, autre chose agiter. Conséquemment, ce que fournit la mémoire est le fait d'un esprit sain; ce qu'un esprit sain poursuit dans l'extase, sans en perdre la mémoire, est un espèce de démence. Voilà pourquoi cet état s'appelle rêve et non aliénation; voilà pourquoi nous sommes alors dans notre sens, ou jamais. Car, quoique notre raison soit voilée en ce moment, elle n'est pas éteinte, si ce n'est qu'alors elle peut paraître superflue; or, la vertu propre à l'extase, c'est de nous apporter les images de la sagesse aussi bien que de l'erreur.
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A Treatise on the Soul
Chapter XLV.--Dreams, an Incidental Effect of the Soul's Activity. Ecstasy.
We are bound to expound at this point what is the opinion of Christians respecting dreams, as incidents of sleep, and as no slight or trifling excitements of the soul, which we have declared to be always occupied and active owing to its perpetual movement, which again is a proof and evidence of its divine quality and immortality. When, therefore, rest accrues to human bodies, it being their own especial comfort, the soul, disdaining a repose which is not natural to it, never rests; and since it receives no help from the limbs of the body, it uses its own. Imagine a gladiator without his instruments or arms, and a charioteer without his team, but still gesticulating the entire course and exertion of their respective employments: there is the fight, there is the struggle; but the effort is a vain one. Nevertheless the whole procedure seems to be gone through, although it evidently has not been really effected. There is the act, but not the effect. This power we call ecstasy, in which the sensuous soul stands out of itself, in a way which even resembles madness. 1 Thus in the very beginning sleep was inaugurated by ecstasy: "And God sent an ecstasy upon Adam, and he slept." 2 The sleep came on his body to cause it to rest, but the ecstasy fell on his soul to remove rest: from that very circumstance it still happens ordinarily (and from the order results the nature of the case) that sleep is combined with ecstasy. In fact, with what real feeling, and anxiety, and suffering do we experience joy, and sorrow, and alarm in our dreams! Whereas we should not be moved by any such emotions, by what would be the merest fantasies of course, if when we dream we were masters of ourselves, (unaffected by ecstasy.) In these dreams, indeed, good actions are useless, and crimes harmless; for we shall no more be condemned for visionary acts of sin, than we shall be crowned for imaginary martyrdom. But how, you will ask, can the soul remember its dreams, when it is said to be without any mastery over its own operations? This memory must be an especial gift of the ecstatic condition of which we are treating, since it arises not from any failure of healthy action, but entirely from natural process; nor does it expel mental function--it withdraws it for a time. It is one thing to shake, it is another thing to move; one thing to destroy, another thing to agitate. That, therefore, which memory supplies betokens soundness of mind; and that which a sound mind ecstatically experiences whilst the memory remains unchecked, is a kind of madness. We are accordingly not said to be mad, but to dream, in that state; to be in the full possession also of our mental faculties, 3 if we are at any time. For although the power to exercise these faculties 4 may be dimmed in us, it is still not extinguished; except that it may seem to be itself absent at the very time that the ecstasy is energizing in us in its special manner, in such wise as to bring before us images of a sound mind and of wisdom, even as it does those of aberration.