2.
J’ai dit aussi : « Il y a deux ordres de personnes dignes de louanges dans la religion. Le premier se compose de celles qui l’ont déjà trouvée, et celles-là doivent être jugées bienheureuses. Le second se compose de celles qui la recherchent avec zèle et avec droiture. Les premières sont en possession, les autres sont sur le chemin; muais par ce « chemin, on est sûr d’arriver au but. » Si les bienheureux qui ont déjà trouvé, et qui sont en possession, ne sont plus en cette vie, mais en celle que nous espérons et où nous tendons par la foi, il n’y a pas d’erreur dans mes paroles; car on doit affirmer que ceux-là ont trouvé ce qu’il faut chercher, puisqu’ils sont arrivés là où en cherchant et en croyant, c’est-à-dire en suivant la vie de la foi, nous espérons parvenir. Si au contraire on croyait qu’ils sont, ou ont été bienheureux dès cette vie, cela ne serait pas exact; non pas qu’il ne puisse s’y découvrir aucune vérité qui soit vue de l’intelligence sans être crue par la foi; mais parce que tout ce qui est ici-bas ne va pas jusqu’à produire la béatitude. En effet, ce dont l’Apôtre dit:
«Nous voyons maintenant à travers un miroir en énigme, » et : « Maintenant je connais imparfaitement, » est vu par l’esprit, vu pleinement, et cependant ne produit pas encore la béatitude. Ce qui la produit, l’Apôtre le dit: « Mais alors nous verrons face à face; » et « Alors je connaîtrai aussi bien que je suis connu 1. » Ceux qui ont trouvé cela sont, on peut le dire, établis dans la possession de la béatitude, à laquelle conduit le chemin de la foi que nous suivons, et à laquelle nous souhaitons d’arriver par la foi. Mais quels sont ces bienheureux qui sont déjà en possession du but où conduit cette route? c’est. une grande question.. Que les saints anges y soient, il n’y a pas de doute. Mais les hommes saints, déjà morts , peut-on dire qu’ils soient réellement dans cette possession? C’est une question à examiner. Ils sont, il est vrai, délivrés, de ce corps de corruption qui est à charge à l’âme; mais ils attendent encore eux-mêmes la rédemption de leurs corps; leur chair se repose dans L’espoir, mais elle ne brille pas encore de l’éclat de l’incorruptibilité future. Du reste ce n’est pas ici le lieu de rechercher s’ils n’ont pas moins la jouissance de la contemplation de la vérité par les yeux du coeur, et, comme il est écrit : « face à face. » J’ai dit également: «Savoir ce qui est grand, ce qui est honnête, et même ce qui est divin, voilà la béatitude ; » il faut rapporter ces mots à la béatitude dont je viens de parler. Car, tout ce qu’on sait de cela dans la vie d’ici-bas, n’est pas encore la béatitude; et ce qu’on en ignore .est incomparablement supérieur à ce qu’on cri sait.
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I Cor. XIII, 12. ↩