4.
Quand j’ai dit : « Personne ne saurait «douter que tous les hommes sont ou des fous ou des sages 1; » cette parole peut paraître contraire à ce que j’ai dit dans le troisième livre du Libre Arbitre: « Comme si la nature « humaine n’avait pas une sorte de milieu entre «la folle et la sagesse 2 ! » Mais dans le premier passage il s’agissait d’examiner si le premier homme a été créé sage ou insensé, ou ni l’un ni l’autre. On ne pouvait pas appeler insensé celui qui avait été créé sans défaut, puisque la folie est un grand défaut; d’un autre côté, comment appeler sage celui qui a pu être séduit? J’ai donc dit en manière de résumé «Comme si la nature humaine n’avait pas une « sorte de milieu entre la sagesse et la folie. » J’avais aussi en vue les petits enfants que nous reconnaissons entachés du péché originel mais que nous ne pouvons, proprement appeler ni sages ni fous, puisqu’ils n’usent encore de leur libre arbitre ni en bien ni en mal. Et quand j’ai dit ici que tous les hommes sont sages ou fous, j’ai voulu parler de ceux qui usent de leur raison, laquelle les distingue des animaux et fait qu’ils sont hommes. C’est dans le même sens que nous disons que tous les hommes veulent être heureux. En effet, en émettant cette pensée si vraie et si évidente, est-ce que nous craignons qu’on n’y comprenne les enfants qui ne peuvent pas avoir encore une volonté pareille?