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Les Soliloques
13.
L. R. Sois de nouveau attentif , et revenons sur les mêmes idées, afin de mieux marquer le but auquel nous nous efforçons d'atteindre. — A. Me voici, dis-moi ce que tu voudras , j'ai résolu de supporter ces longs circuits et je ne crains point cette fatigue, dans l'espoir de parvenir enfin au but vers lequel je sais que nous tendons. — L. R. Tu fais bien, mais réponds à cette question: Lorsque tu vois deux oeufs tout à fait semblables, crois-tu que l'on puisse dire que l'un des deux est faux? — A. Je ne le crois pas du tout; car si tous les deux sont des oeufs, ce sont des oeufs véritables. — L. R. Et lorsque nous apercevons une image réfléchie par un miroir, à quel signe jugeons-nous que c'est une fausse image? — A. C'est qu'on ne peut la toucher, qu'elle ne fait point de bruit, qu'elle ne se meut pas, qu'elle ne vit pas; il y a aussi un grand nombre d'autres signes qu'il serait trop long d'indiquer.— L. R. Je vois que tu ne veux pas être retardé, et il faut se conformer à ton impatience. Ainsi, pour ne pas tout rappeler, si ces hommes que nous apercevons en songe pouvaient vivre, parler, être touchés par ceux qui sont éveillés; s'il n'y avait aucune différence entre eux et ceux que, bien sains et bien éveillés, nous voyons et nous entretenons, pourrions-nous dire que ce sont de faux hommes?— A. Comment aurait-on raison de le dire? — L. R. Donc, s'ils étaient aussi vrais qu'ils paraissent semblables aux hommes véritables, s'il n'y avait aucune différence entre eux, et s'ils sont faux à cause des différences qui les rendent dissemblables , ne doit-on pas avouer. que la similitude est la mère de la vérité, et la dissimilitude celle de la fausseté? — A. Je n'ai rien à te répondre, et je suis confus du consentement téméraire que j'ai accordé plus haut.
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Soliloquia (PL)
13.
R. Nunc attende, dum eadem rursum recurrimus, quo fiat apertius quod conamur ostendere. A. Eccum, loquere quod vis. Nam ego circumitum istum semel statui tolerare, neque in eo defatiscar spe tanta perveniendi quo nos tendere sentio. R. Bene facis. Sed attende utrum tibi videatur, cum ova similia videmus, [Col. 0891] aliquod eorum falsum esse recte nos posse dicere. A. Nullo modo videtur. Omnia enim si ova sunt, vera ova sunt. R. Quid, cum de speculo resultare imaginem videmus? quibus signis falsam esse comprehendimus? A. Scilicet quod non tenetur, non sonat, non per se movetur, non vivit, et caeteris innumerabilibus, quae prosequi longum est. R. Video te nolle immorari, et properationi tuae mos gerendus est. Itaque, ne singula repetam, si et illi homines quos videmus in somnis, vivere, loqui, teneri a vigilantibus possent, nihilque inter ipsos differret, et eos quos expergefacti ac sani alloquimur et videmus, numquidnam eos falsos diceremus? A. Quo pacto istud recte diceretur? R. Ergo si eo veri essent, quo veri simillimi apparerent, nihilque inter eos et veros omnino distaret, eoque falsi quo per illas vel alias differentias dissimiles convincerentur; nonne similitudinem veritatis matrem, et dissimilitudinem falsitatis esse fatendum est? A. Non habeo quid dicam, et pudet me tam temerariae consensionis meae superioris.