22.
L. R. Sois donc attentif à ce qu'il me reste à te dire. — A. Parle, si tu as quelque chose à m'enseigner, que je puisse comprendre et que je sois porté à admettre. — L. R. Nous savons qu'une choie est dans une autre de deux manières différentes. D'une première manière, quand elle peut en être séparée et transportée ailleurs ; ainsi, ce morceau de bois est dans ce lieu, le soleil est au levant. D'une seconde manière, quand une chose est tellement unie au sujet qu'elle ne peut en être séparée; ainsi,, dans ce même morceau de bois la nature et la forme que nous voyons, la lumière dans le soleil, dans le feu, la chaleur, la science dans l'âme, et ainsi des autres choses semblables. Crois-tu autrement?
A. Ce sont d'anciennes propositions qui nous ont été enseignées et que nous avons étudiées avec le plus grand soin dès les premières années de notre adolescence; ainsi, puisque tu m'interroges à ce sujet, je ne puis m'empêcher d'en admettre la vérité sans aucune hésitation. — L. R. Allons plus loin : Ne reconnais-tu pas que ce qui est inséparable du sujet ne peut subsister, si le sujet ne subsiste? — A. J'avoue également que cela est nécessaire; mais quiconque examinera la chose avec attention reconnaîtra qu'il est possible que le sujet subsistant, tout ce qui est dans le sujet ne subsiste pas. La couleur de notre corps peut s'altérer par la maladie et par l'âge, quoique le corps ne périsse pas encore. Cependant il n'en est pas ainsi de toutes les propriétés du sujet, mais seulement de celles qui ne sont pas absolument nécessaires à l'existence du sujet auquel elles appartiennent. Pour que ce mur existe, il n'est pas nécessaire que nous le voyions de telle couleur; qu'il vienne à blanchir ou à noircir par quelque accident, qu'il prenne d'autres couleurs encore, il ne cessera pas néanmoins d'être appelé et d'être réellement un mur. Mais si le feu manque de chaleur, il n'est plus feu, et nous ne pouvons appeler neige ce qui est privé de blancheur.