2.
Mais,je vous prie, n'avez-vous pas eu hier pitié de nous, lorsque, après nous être couchés avec la résolution de nous lever uniquement pour reprendre la question , nous avons été envahis par des affaires domestiques à tel point que nous avons pu à peine vivre pour nous aux deux dernières heures de la journée ? C'est pourquoi j'ai été toujours d'avis que l'homme une fois sage n'avait plus besoin de rien, mais que, pour qu'il devienne sage, la fortune est très-nécessaire1. Je ne sais si Alype est d'un autre avis. Je ne vois pas bien encore, dit Alype, quel droit tu donnes à la fortune. Si pour la mépriser elle-même tu crois qu'on a besoin d'elle, je pense d'elle comme toi. Mais si tu n'accordes rien autre à la fortune que le rôle de présider aux biens du corps, je ne puis penser comme toi. Car, ou malgré elle et toutes les résistances, celui qui n'est point encore sage, mais désire le devenir, peut faire usage de tout ce que nous reconnaissons nécessaire à nos besoins corporels : ou bien, il faut convenir qu'elle commande à toute l'existence du sage même, puisque, tout sage qu'il est, il ne peut se soustraire aux besoins de son corps.
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Rétr. liv. I, chap. I, n, 1. ↩