7.
L. Al. Puisque nous en sommes venus à parler du joueur de cithare et du joueur de flûte, c'est-à-dire de ce qui touche à la musique, dis-moi s'il ne faut pas attribuer au corps, en d'autres termes, à une sorte de docilité des organes, les effets que ces gens produisent par incitation? — L’E. Selon moi cette docilité tient à l'âme et au corps tout ensemble. Cependant tu as employé, avec une justesse parfaite le mot de docilité : les organes, en effet, ne doivent obéir qu'à l'âme. — L. M. Je vois bien toutes les précautions que tu emploies pour ne pas accorder exclusivement au corps la faculté d'imitation. Nieras- tu néanmoins que la science soit le privilège de l'âme? — L’E. Comment le nier? — L. M. Tu ne peux donc, en aucune façon, rapporter à l'imitation et à la raison tout ensemble, la science qui apprend à faire vibrer les cordes et résonner les flûtes; car cette imitation, tu l'as reconnu, ne peut exister sans le corps, tandis que la science ne procède que de l'âme. — L’E. C'est la conséquence, je l'avoue, de ce que j'ai avancé, mais qu'importe? Le joueur de flûte tiendra aussi sa science de son âme. L'imitation sans doute ne peut exister indépendamment du corps, mais en s'ajoutant à la science , elle ne fera pas disparaître cette science toute spirituelle qu'il possède. — L. M. Non, sans doute, elle ne la fait pas disparaître. Sans prétendre que tous ceux qui touchent de ces instruments sont étrangers à la science musicale, je soutiens que tous ne la possèdent pas. Voilà le point précis auquel je ramène la question, afin de faire complètement entendre, s'il est possible, avec quelle justesse nous avons fait entrer le mot science dans la définition de la musique; car si les joueurs de flûte ou de lyre et autres gens qui exercent un pareil métier possédaient la science musicale, il n'y aurait rien, à mon sens, de plus bas et de plus vil que la musique.