55.
Le diable donc et ses anges, détournés de la lumière et du feu de la charité, et ayant grandement marché dans l'orgueil et l'envie, ont été comme engourdis dans une dureté de glace. C'est pourquoi ils sont représentés sous la figure de l'aquilon. Aussi quand le démon s'étendait sur le genre humain, la grâce du Sauveur était prophétisée dans le Cantique des Cantiques : « Lève-toi, aquilon, viens, vent du midi, souffle dans mon jardin, et les parfums s'exhaleront 1 ». Lève-toi, toi qui t'es précipité sur le monde, toi qui le tiens sous ton empire et qui pèses sur lui; lève-toi, pour que ceux dont tu opprimais les âmes soient soulagés de ton poids. « Et viens, vent du midi; » par là l'épouse invoque l'Esprit de grâce, qui souffle du côté du midi comme d'un point chaud et lumineux, afin que les parfums coulent. De là ces mots de l'Apôtre : « Nous sommes la bonne odeur du Christ en tout lieu 2. » Il est dit aussi dans un psaume : « Faites cesser, Seigneur, notre captivité, comme le vent du midi change en torrent les neiges amoncelées 3; » le démon, comme un vent du nord, retenait ces âmes captives; elles s'étaient refroidies dans l'iniquité et s'étaient gelées en quelque sorte. L'Evangile nous dit en effet : « Parce que l'iniquité abondera, la charité de plusieurs se refroidira 4. » Mais, au souffle du vent du midi, la glace se fond, les torrents coulent, c'est-à-dire que, les péchés étant remis, les peuples courent vers le Christ parla charité. Ailleurs encore il est écrit : « Vos péchés se fondront comme la glace en un jour doux et serein 5.»