16.
Voilà ce que je réponds et d'autres choses encore, comme je puis, à ceux qui s'efforcent de démolir cette opinion que les âmes sont créées pour chacun comme la première le fut pour le premier homme. Mais quand on arrive aux peines des enfants, je suis, croyez-moi, grandement embarrassé, et je ne trouve rien à répondre; je ne parle pas seulement des peines qui suivent leur inévitable damnation après cette vie s'ils meurent sans le sacrement de la grâce chrétienne , mais même de celles qu'ils souffrent en ce monde sous nos yeux : si je voulais les énumérer, le temps me manquerait plutôt que les exemples. Ces enfants languissent dans les maladies, sont déchirés de douleurs, torturés par la faim et la soif; ils sont estropiés, privés de l'usage de leurs sens, tourmentés par les esprits immondes. Il faudrait montrer comment ils souffrent tout cela justement. Il. n'est pas permis de dire, ou que ces choses arrivent sans que Dieu le sache, ou qu'il ne peut pas résister aux auteurs de ces maux, ou qu'il les fait ou permet injustement. Est-ce que nous pourrons dire de l'homme ce que nous disons des animaux sans raison, livrés, pour leur usage, à des natures plus excellentes quoique mauvaises, comme, dans l'Evangile, nous voyons des pourceaux concédés à des démons et à leurs désirs 1 ? L'homme est un animal, mais raisonnable quoique mortel. C'est une âme douée de raison qui , dans ce corps, est punie par de si grandes souffrances. Dieu est bon, Dieu est juste, Dieu est tout-puissant ; il serait insensé d'en douter. Disons donc que c'est avec justice que les enfants souffrent de si grands maux. Lorsque de plus âgés endurent des maux pareils , nous avons coutume de dire que c'est une épreuve de leur vertu comme dans Job, ou un châtiment de leurs crimes comme dans Hérode ; certains exemples que Dieu a bien voulu mettre en lumière nous aident à comprendre ce qui est obscur ; ruais ceci regarde ceux qui sont en âge de raison. Quoi répondre en ce qui touche les enfants , si de grandes souffrances ne servent pas à punir en eux des péchés, car à leur âge il n'y a pas d'épreuve possible ?
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Matth. VIII, 32. ↩