18.
J'ai dit quelque chose , dans mon ouvrage du Libre Arbitre, non pas sur la différence des esprits, mais sur les peines que les enfants souffrent en cette vie ; voici ce passage tiré du troisième livre; il ne me satisfait point dans la question qui nous occupe, et je vous dirai ensuite pourquoi :
« Mais quant aux souffrances corporelles des enfants, à un âge où ils ne peuvent commettre aucun péché , si leurs âmes n'existaient pas avant qu'ils devinssent des hommes, on a coutume de les plaindre davantage et avec une sorte de pitié, en disant : Quel mal ont-ils fait pour souffrir ainsi ? comme si l'innocence était un mérite, alors qu'il est impossible de faire le mal ! Dieu opère quelque chose de bon en corrigeant les parents, et il les châtie par les douleurs et la mort des enfants qui leur sont chers : pourquoi ces peines n'arriveraient-elles pas, puisqu'une fois passées, elles sont comme non avenues pour ceux qui les ont endurées, et que ceux pour qui elles ont été permises , ou bien seront meilleurs si, corrigés par ces peines temporelles, ils se décident à mieux vivre; ou bien ils seront sans excuse au jour du jugement, si les tourments de cette vie ne leur ont pas servi à souhaiter les félicités éternelles. Quant à ces enfants dont les douleurs brisent la (437) dureté des parents, exercent leur foi ou éprouvent leur compassion, qui sait ce que Dieu leur réserve de bons dédommagements dans le secret de ses jugements ? Ils n'ont rien fait de bien , il est vrai , mais pourtant ils ont souffert sans avoir péché. Ce n'est pas en vain que l'Eglise honore comme des martyrs les enfants massacrés par Hérode, lorsque celui-ci cherchait Notre-Seigneur Jésus-Christ pour le faire mourir 1. »
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Libre Arbitre. liv. 3, chap. XXIII, n. 67. ↩