26.
Je ne veux pas qu'on me cite à l'appui de cette opinion ce qui est écrit : « Celui qui a formé l'esprit de l'homme en lui-même 1;» et encore : « Celui qui a formé en particulier leurs coeurs 2. » Nous avons besoin de quelque chose de très-fort et d'irrésistible pour nous obliger à croire que Dieu puisse damner des âmes sans péché. « Créer » vaut autant et plus peut-être que « former; » et cependant il est écrit : « Créez en moi un coeur pur, ô mon Dieu 3 ; » et ce passage ne peut pas vouloir dire que l'âme souhaite l'existence , avant qu'elle soit quelque chose. De même donc que déjà existante elle est créée par un renouvellement de justice, ainsi déjà existante, elle est formée en se conformant à la doctrine. Cette opinion que nous voudrions suivre n'est pas appuyée davantage par cet endroit de l'Ecclésiaste : « Alors la poussière retournera à la terre comme elle y a été, et l'esprit retournera vers Dieu qui l'a donné 4 : » ces paroles favoriseraient plutôt ceux qui pensent que toutes les âmes proviennent d'une seule. De même, diront-ils, que la poussière retourne. à la terre comme elle y a été, et la chair, dont il s'agit ici, ne retourne pas à l'homme d'où elle tire son origine, mais à la terre d'où le premier homme a été fait; de même l'esprit, venu de l'esprit d'un seul, ne retourne pourtant pas à lui, mais au Seigneur qui le lui a donné. Ce passage, tout en prêtant quelque appui aux partisans de cette opinion, ne parait pas cependant absolument contraire à l'opinion que je veux défendre, et je crois devoir avertir votre sagesse de ne pas employer des preuves semblables pour chercher à me tirer de mes incertitudes. Mais quoique les souhaits de personne ne puissent faire que ce qui n'est pas vrai le soit, pourtant, si c'était possible, je désirerais que cette opinion fût conforme à la vérité , comme je désire que vous l'établissiez clairement et invinciblement, si elle est vraie.