10.
Vous répétez souvent, comme je l'entends dire, que les soixante et dix disciples se retirèrent du Seigneur, qu'il les laissa s'éloigner au gré de leur volonté mauvaise et impie, et qu'il répondit aux douze qui étaient restés : « Vous aussi ne voulez-vous pas vous en aller 1 ? » Vous ne faites pas attention qu'alors l'Eglise ne faisait que commencer à croître, et qu'en elle ne s'était point encore accomplie cette parole du prophète : « Et tous les rois de la terre l'adoreront ; toutes les nations la serviront 2. » Plus cette parole s'accomplit, plus l'Eglise use d'autorité, non-seulement pour inviter, mais encore pour forcer au bien. C'est ce que le Seigneur voulait enseigner alors; car quelque grande que fût sa puissance, il préféra recommander d'abord l'humilité. C'est ce qu'il fit voir aussi, et assez clairement, dans la parabole du festin; les conviés n'ayant pas voulu venir, il dit à un serviteur : « Va sur les places et dans les rues de la ville, et amène ici les pauvres, les infirmes, les aveugles et les boiteux. Et le serviteur dit à son maître : Il a été fait comme vous avez, commandé, et il y a encore de la place. Et le maître dit au servi« tour : Va dans les chemins et le long des « haies, et force d'entrer afin que ma maison se remplisse 3. » Remarquez qu'il est dit des premiers qui sont venus : « Amène-les ici,» et non pas : « force ; » cela représentait le commencement de l'Eglise qui croissait afin d'arriver au point de forcer. Mais il fallait qu'avec ses forces et sa grandeur elle contraignît les hommes au festin du salut éternel ; c'est pourquoi, après les mots où il est dit que les ordres du maître sont exécutés et qu'il y a encore de la place, le maître ajoute : « Va dans les chemins et le long des haies, et force d'entrer. » Si donc vous vous en alliez paisiblement hors de ce festin du salut éternel et de l'unité de la sainte Eglise, nous vous trouverions comme dans les chemins; mais, à cause de vos violences répétées contre les nôtres, vous êtes comme rempli d'épines et d'aspérités ; nous vous trouvons comme dans des baies, et nous vous forçons d'entrer 4. Celui qui est contraint va où il ne veut pas ; mais une fois entré dans la salle du festin, il mange librement. Réprimez donc votre esprit si injuste et si agité pour que vous trouviez un festin salutaire dans la véritable Eglise du Christ.