3.
Nous ne supportons pas sans chagrin qu'ils partent si tôt d'ici, quoique ce soit pour s'en retourner vers vous; car voyez de quels sentiments nous sommes agités ! nous voulions d'autant plus les laisser partir qu'ils souhaitaient plus ardemment de vous obéir; mais leur vif désir de vous joindre ne faisait que vous rapprocher de nous : car ils montraient ainsi combien vos entrailles leur sont chères voilà pourquoi nous voulions d'autant moins les laisser partir qu'il y avait plus de justice dans leurs instances pour s'en aller. O chose impossible à supporter s'il n'était pas vrai que cette séparation ne dût point nous séparer, « si nous n'étions pas membres d'un même corps, si nous n'avions pas un même chef, si la même grâce ne se répandait pas sur nous, si nous ne vivions pas du même pain, si nous ne marchions pas dans la même voie, si nous n'habitions pas la même maison ! » Pourquoi ne nous servirions-nous pas des mêmes paroles que vous?. Vous les reconnaissez, je pense, comme étant tirées de votre lettre 1. Mais pourquoi ces paroles seraient-elles plutôt vôtres que miennes, puisque, du moment qu'elles sont vraies, elles nous viennent de la communication du même chef? Et si elles ont quelque chose qui vous ait été donné en propre, je les en aime davantage; c'est au point qu'elles se sont emparées du chemin de mon coeur et n'ont rien laissé passer de mon cœur à ma langue jusqu'à ce qu'elles aient pris dans ma pensée le premier rang qui appartient à ce qui vient de vous. Frères saints et aimés de Dieu, membres du même corps que nous, qui doutera qu'un même esprit soit notre vie, si ce n'est celui qui ne sait point par quelle affection nous sommes liés les uns aux autres ?
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Ci-des. tom. I, Lettre XXX, n. 2. ↩