27.
Le susdit évêque de Bagaïe ayant en effet obtenu par jugement une basilique catholique dont les donatistes s'étaient emparés, ceux-ci l'attaquèrent à l'autel avec une impétuosité et une fureur horribles; ils l'accablèrent inhumainement de coups de bâton et s'armèrent contre lui de tout ce qu'ils rencontrèrent et même des morceaux de bois de l'autel brisé ; ils lui donnèrent aussi un coup de poignard dans l'aine; il serait mort à cause de tout le sang qu'il perdait, si la cruauté même de ses bourreaux n'avait profité à sa vie. Tandis qu'ils le traînaient par terre, la poussière s'amassa sur sa blessure et arrêta l'écoulement du sang. Ils le laissèrent enfin, et les nôtres s'avancèrent pour l'emporter en chantant des psaumes; mais les misérables revinrent avec une rage nouvelle, l'arrachèrent aux mains des catholiques qu'ils maltraitèrent et mirent en fuite : ils étaient en grande multitude, et la terreur qu'inspiraient leurs cruautés ajoutait à la force de leur nombre. Les bourreaux portèrent au sommet d'une tour l'évêque qu'ils croyaient mort, mais qui vivait encore; et le précipitèrent de cette hauteur. Il tomba sur je ne sais quel monceau qui était mou ; des passants, pendant la nuit, l'ayant aperçu et reconnu à la lueur d'une lanterne, le ramassèrent et le transportèrent dans une pieuse maison; son état paraissait désespéré, mais il fut sauvé par les grands soins qui lui furent prodigués durant plusieurs jours. Cependant le bruit s'était répandu jusqu'au delà des mers qu'il avait été tué par le crime des donatistes. Lorsqu'il y alla lui-même et qu'il se montra vivant aux yeux étonnés, on comprit, en voyant le nombre et la gravité de ses récentes blessures, que la renommée eût pu le faire passer pour mort.