1.
Bien-aimé frère Dardanus, plus illustre pour moi dans la charité du Christ que dans les dignités de ce siècle, j'avoue que j'ai répondu à votre lettre plus tard que je n'aurais dû. Je ne voudrais pas que vous en demandassiez les causes, de peur que vous ne supportassiez plus difficilement mes longues excuses que vous n'avez supporté mes longs retards. J'aime mieux que vous me pardonniez aisément mes torts que si vous aviez à juger ma défense. Quels qu'aient pu être mes motifs, croyez qu'il n'a pu entrer en moi aucun dédain de ce qui vous touche. Au contraire, je vous aurais répondu promptement si je vous avais compté pour peu. Ce n'est pas qu'en vous répondant si tard je sois enfin parvenu à composer poser quelque chose de digne d'être lu par vous et de vous être adressé; mais j'ai mieux aimé vous écrire d'une manière quelconque, que de passer encore cet été sans payer ma dette. Je n'ai ni tremblé ni hésité en présence de votre rang si haut ; votre bienveillance m'est plus douce que votre dignité ne m'est redoutable. Mais ce qui fait que je vous aime fait aussi que je trouve plus difficilement de quoi suffire à l'avidité de votre religieux amour.