3.
Je n'ai pas d'assez grands loisirs pour réfuter ses opinions une à une; je suis obligé de les donner à des travaux plus urgents. Mais considérez vous-même avec un peu plus d'attention et avec cet esprit que vous montrez dans vos lettres et que j'aime comme un don de Dieu, le discours de ce certain Romain, ainsi que vous l'appelez, et vous verrez qu'il n'a pas craint de déchirer presque toute l'Église du Christ, depuis le levant jusqu'au couchant, par d'outrageantes paroles; je ne devrais pas dire presque toute, mais toute l'Église, car il n'a pas même épargné les Romains, dont il semble défendre les usages, ne prenant pas garde que l'impétuosité de ses injures va les (12) atteindre eux-mêmes. Quand les arguments lui manquent pour prouver qu'il faut jeûner le samedi, il se tourne vivement contre le luxe des festins et la honteuse ivrognerie des banquets, comme si ne pas jeûner c'était s'enivrer. Si cela est, que sert-il aux Romains de jeûner le samedi? Les jours où ils ne jeûneront pas, il faudra, selon l'auteur de la dissertation, ne voir en eux que des ivrognes et des adorateurs de leur ventre. Or, si autre chose est d'appesantir son coeur dans la crapule et l'ivrognerie, ce qui est toujours un mal, autre chose est de se relâcher du jeûne en restant modéré et tempérant, ce qu'un chrétien fait sans reproche le dimanche. Que l'auteur de la dissertation ne confonde pas les repas des saints avec la voracité et l'ivrognerie des adorateurs de leur ventre, de peur qu'il ne mette les Romains eux-mêmes, quand ils ne jeûnent pas, au rang de ces derniers; et alors il cherchera à savoir; non pas s'il est permis de s'enivrer le samedi, ce qui ne l'est pas davantage le dimanche, mais s'il faut se dispenser de jeûner le samedi aussi bien que le dimanche.