54.
C'est pourquoi celui qui dit que le Seigneur doit bientôt venir dit quelque chose de plus souhaitable, mais ce n'est pas sans danger qu'il pourrait se tromper. Plût à Dieu qu'il dît vrai, car le contraire serait fâcheux. Mais celui qui dit que le Seigneur doit tarder à venir, tout en espérant et en aimant son avènement, son erreur même, en cas qu'il se trompe, devient une douce erreur; si les choses arrivent comme il le pense, quelle grande patience sera la sienne !
Si les choses arrivent autrement, quelle sera sa joie ! Ainsi pour ceux qui aiment la manifestation du Seigneur, il est plus doux de croire le premier, plus sûr de croire le second; mais celui qui avoue ne pas savoir où est la vérité entre ces deux sentiments, souhaite que le premier ait raison, se résigne à l'avis du second, et il est certain de ne pas se tromper, parce qu'il n'affirme et ne nie rien. Je suis, quant à moi, comme ce troisième serviteur, et je vous conjure de ne pas me mépriser; car je vous aime, vous qui affirmez ce que je désire être la vérité; je veux d'autant plus que vous ne vous trompiez pas, que j'aime davantage ce que vous annoncez, et que je trouverais plus dangereuse votre erreur. Pardonnez-moi si j'ai fatigué votre piété; il m'arrive rarement de vous écrire, et j'ai voulu aujourd'hui jouir longtemps du plaisir de converser avec vous, au moins par lettre.