4.
Peut-être me suis-je étendu plus que je n'aurais dû, mais j'ai conversé avec vous bien moins que je n'aurais voulu. Je vous l'avoue , en vous écrivant, je me crois en votre présence; quoique mon langage soit inculte, et que de temps en temps les expressions me manquent, je ne me lasse pas de vous parler, comme si je conversais avec vous. Jugez par là de mon désir de vous voir. J'aurais dû déjà finir cette lettre, dont la longueur verbeuse vous déplaît peut-être; mais j'écarte la crainte pour céder au plaisir, et il me semble que cesser de vous parler, ce serait vous quitter. Je veux terminer, mais je ne le puis; vous m'en croirez, ô mon père ! vous étiez au plus profond de mon âme depuis que, non content de vous connaître par votre grande et glorieuse renommée, j'avais voulu vous connaître par vos ouvrages ; mais cette courte lettre que vous m'avez adressée a allumé dans mon coeur les flammes du plus vif amour pour vous. Je suis chrétien, né de parents et d'aïeux chrétiens; cependant, quelque chose du paganisme m'était resté, et c'est en vous lisant que j'ai appris à me séparer tout à fait de ces vaines superstitions du passé. Je demande que vous daigniez nous envoyer les livres des Confessions que vous avez écrits, car si d'autres aussi nous ont donné vos écrits avec un empressement aimable et un coeur bienveillant, combien plus encore ne devez-vous pas nous les refuser vous-même!