4.
Aussi notre bon Maître nous a enseigné par son Apôtre que nous ne devons pas faire le bien en vue d'obtenir les louanges humaines, c'est-à-dire qu'elles ne doivent pas être le but de nos bonnes actions ; mais que cependant nous devons rechercher les louanges des hommes pour les hommes eux-mêmes. Car les louanges adressées aux gens de bien ne profitent pas à ceux qui les reçoivent, mais à ceux qui les donnent. Pour ce qui est des gens de bien, il leur suffit d'être ce qu'ils sont. mais il faut féliciter ceux qui ont besoin de les imiter; lorsqu'ils leur donnent des louanges, ils montrent ainsi leur goût pour ceux qu'ils louent sincèrement. L'Apôtre a dit : « Si je plaisais aux hommes, je ne serais pas le serviteur du Christ 1. » Mais il a dit aussi : « Plaisez à tous en toutes choses, comme je m'efforce moi-même de plaire en toutes choses à tous. » Et il en donne la raison : « non point en cherchant ce qui m'est avantageux, mais ce qui l'est à plusieurs, afin qu'ils soient sauvés 2. » Voilà ce qu'il cherchait dans la louange des hommes et ce qui lui faisait dire encore . « Enfin, mes frères, tout ce qui est vrai, tout ce qui est honnête, tout ce qui est juste, tout ce qui est saint, tout ce qui est aimable, tout ce qui a une bonne réputation, tout ce qui est vertueux, tout ce qui est louable, que ce soit là ce qui occupe vos pensées; faites ce que vous avez appris et reçu de moi, ce que vous m'avez entendu dire et ce que vous avez vu en moi, et le Dieu de paix sera avec vous 3. » En disant : « Tout ce qui est vertueux, » l'Apôtre a compris sous le nom de vertu les autres choses que j'ai rappelées plus haut. Ce qu'il a ajouté par ces paroles : « Tout ce qui a une bonne réputation, » il l'exprime convenablement de cette autre manière : « Tout ce qui est louable. » Comment donc faut-il entendre ce passage : « Si je plaisais aux hommes, je ne serais pas le serviteur du Christ? » Dans ce sens que s'il faisait, en vue des louanges humaines, le bien qu'il fait, il serait enflé de l'amour des louanges. L'Apôtre voulait ainsi plaire à tous, et se réjouissait de leur plaire , non pour s'enorgueillir de leurs louanges, mais pour les édifier dans le Christ. Pourquoi donc n'aurais-je pas du plaisir à recevoir de vous des louanges, puisque vous êtes trop sincère pour me tromper; puisque vous louez ce que vous aimez, ce qu'il est utile et salutaire d'aimer, lors même que tout cela ne serait pas en moi? Vous n'êtes pas seul à en profiter, j'en profite aussi. Si je n'ai pas ce que vous louez en moi, j'en ressens une confusion salutaire, et je souhaite ardemment ce qui me manque. Si je reconnais en moi quelque chose de ce que vous louez, je me réjouis de l'avoir et me réjouis que vous l'aimiez et que vous m'aimiez à cause de cela; ce qui me manque, je désire l'obtenir, non-seulement pour moi-même, mais afin que mes amis ne soient pas toujours trompés dans les louanges qu'ils me donnent.