3.
Je crois que tout mouvement de l'âme fait quelque chose dans le corps; et quand il est plus prononcé, il se révèle malgré la faiblesse et la pesanteur de nos sens : la colère, la tristesse et la joie ont de visibles expressions. De là cette conjecture permise : lorsque nous avons des pensées dont rien ne nous apparaît dans notre corps, ces pensées peuvent ne pas échapper aux démons dont les sens sont très-pénétrants, et en comparaison desquels les nôtres ne sont rien. Les empreintes corporelles des mouvements de l'âme peuvent demeurer et devenir comme une forme habituelle; secrètement agitées et remuées, elles inspirent, avec une merveilleuse facilité, des . pensées et des songes selon la volonté de celui qui les touche. Si les musiciens, les danseurs de corde et tous les donneurs de spectacles de ce genre, parviennent manifestement à des choses incroyables par le seul exercice de nos organes terrestres et grossiers; il n'est pas absurde de penser que des esprits unis à un corps aérien ou éthéré et capables de pénétrer les autres corps, puissent exciter en nous des impressions à leur guise, sans que nous nous en doutions, mais tout en éprouvant néanmoins quelque chose. Nous ne sentons pas comment l'abondance de la bile nous pousse à des redoublements de colère; elle nous y pousse cependant, puisque, comme je l'ai dit, c'est elle qui les produit.