3.
Si une telle vie ne saurait être le partage de l'humaine nature, pourquoi éprouve-t-on quelquefois cette tranquille confiance? pourquoi l'éprouve-t-on d'autant plus souvent qu'on adore plus ardemment Dieu dans les profondeurs sacrées de l'âme? d'où vient que cette paix nous accompagne dans l'accomplissement même d'un acte humain, si on va de ce sanctuaire à l'action? pourquoi, parfois, dans nos discours, nous ne redoutons pas la mort, et, dans le silence, nous allons jusqu'à la désirer? Je vous le dis à vous, car je n'adresserais pas cette question à tout autre; je vous le dis à vous, dont j'ai bien connu les élans vers les choses d'en. haut; est-ce que, après avoir si souvent éprouvé combien il est doux de vivre avec un coeur mort à tout amour corporel, vous ne reconnaîtrez pas que l'homme puisse s'affranchir assez du sentiment de la crainte pour bien mériter le nom de sage? Et cette ferme et calme impression sur laquelle la raison s'appuie, quand vous l'avez sentie, oserez-vous soutenir que ce n'était pas aux moments où vous vous enfonciez dans les solitudes de votre âme? Cela étant ainsi, vous voyez qu'il,reste une seule chose, c'est que vous avisiez vous-même aux moyens de réaliser notre désir de vivre ensemble. Vous savez mieux que moi ce qui est à faire avec votre mère, que (529) certainement votre frère Victor n'abandonnera pas. Je n'ai voulu vous écrire rien de plus pour ne pas vous détourner de cette pensée.