5.
Vous direz peut-être : N'étant pas un imbécile et m'appliquant surtout à ne pas l'être, je ne veux pas passer pour tel. Fort bien. Mais pourquoi ne le voulez-vous pas? Je vous le demande. Vous n'avez pas craint de m'être importun dans les questions que vous m'avez prié de vous résoudre et de vous expliquer; le grave motif qui vous a déterminé, ce motif si impérieux que vous l'appelez une extrême nécessité, c'est que vous ne vouliez pas vous exposer à passer pour ignorant et borné auprès des hommes enclins au blâme. Est-ce là, dites-moi, toute la raison qui a inspiré votre démarche auprès de moi, ou bien est-ce à cause de quelque autre chose que vous ne voulez pas passer pour ignorant et borné ? Si c'est là toute la raison, vous voyez, je pense, que c'est là aussi toute la fin de ce violent désir par lequel vous m'êtes à charge, comme vous l'avouez vous-même. Mais quoi de pesant peut me venir de Dioscore, si ce n'est ce qui pèse sur Dioscore lui-même sans qu'il s'en doute? Ce poids, il ne le sentira que quand il voudra se lever ; et plût à Dieu que ce fardeau ne fût pas si fortement attaché que Dioscore ne pût plus le rejeter de ses épaules ! Je ne dis pas cela parce qu'on cherche à résoudre des difficultés comme celles qui me sont proposées, mais parce qu'on le cherche dans ce misérable. but. Vous sentez bien que ce but est frivole et vain; il produit une sorte d'enflure et d'abcès autour de l'oeil de l'esprit, qui ne peut plus voir la vérité dans toute sa magnificence. Croyez-moi, il en est ainsi, mon cher Dioscore ; et je jouirai de vous, dans la volonté elle-même et la splendeur de cette vérité dont vous vous éloignez en ne suivant que son ombre. Je ne trouve rien autre à vous dire pour que vous m'en croyiez sur ce point. Car vous ne voyez pas, vous ne pouvez voir cette vérité, tant que vous mettez vos courtes joies dans les discours des hommes.