97.
De plus, tout ce que je viens d'énoncer sur cette lumière de l'intelligence ne m'a été dévoilé que par elle. Par elle en effet je comprends la vérité de mes paroles et c'est elle encore qui me fait voir que je la comprends. Allons plus loin: si un homme comprend qu'il comprend, si de plus il se rend compte de ce dernier acte de son entendement et toujours ainsi, je comprends qu'il s'engage dans l'infini, et qu'il n'y a dans cet infini ni espace ni changement. Je comprends aussi que je ne puis comprendre sans être vivant, et je comprends encore mieux qu'en comprenant j'ai plus de vie. Car la vie éternelle surpasse par sa nature même la vie temporelle, et je ne puis savoir ce que c'est que l'éternité, autrement que par un acte de mon intelligence. Le regard de mon esprit en sépare tout ce qui est muable et je ne puis distinguer en elle aucun temps, parce que le temps suppose des successions de mouvements. Mais dans l'éternité rien ne passe, rien n'est à venir; ce qui finit cesse d'être, et ce qui doit commencer n'est pas encore: l'éternité est toujours. Elle n'a pas été, comme si elle n'était plus; elle ne sera pas, comme si elle n'était pas encore. Aussi a-t-elle pu, seule, dire à l'esprit de l'homme : « Je suis celui qui suis; » et l'on a pu dire d'elle avec la même vérité « Celui qui est, m'a envoyé1. »
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Exod. III, 4. ↩