11.
Si l'âme humaine a eu son principe dans une existence déjà heureuse, il faut admettre que sa formation fut une déchéance ; et au lieu d'avoir été formée de cette matière, elle en serait une dégénérescence. Car, toute matière, à son origine, surtout quand elle la tient de Dieu, est incontestablement plus parfaite. Fût-il possible de concevoir l'âme humaine comme le simple écoulement d'une vie heureuse créée par Dieu, il n'en faudrait pas moins reconnaître qu'elle ne commença à mériter ou à démériter qu'au moment où elle eut une existence personnelle, où elle anima le corps, fit de ses organes les messagers de sa volonté, et eut conscience de sa vie par l'exercice de la liberté, de la pensée, de la mémoire. Car, s'il y avait une existence antérieure et heureuse que le souffle divin aurait fait (229) découler dans la chair après sa formation, et que l'âme eût résulté de cette .insufflation, cet écoulement se serait produit sans activité, sans changement, sans altération dans la substance destinée à devenir l'âme.