XXIV. (Ib. VIII, 15.)
Sur la patience de Dieu. — «Et Pharaon vit qu'il y avait un peu de relâche, et son coeur s'appesantit, et comme le Seigneur l'avait dit, il ne les écouta point. » On voit ici que si Pharaon tomba dans l'endurcissement, ce ne fut pas seulement parce que les enchanteurs faisaient la même chose que Moïse et Aaron ; mais ce fut encore à cause de la patience et de la longanimité de Dieu. La patience divine à l'égard du coeur de l'homme est utile à quelques-uns, qui en profitent pour se repentir; inutile à d'autres, qui en abusent pour s'obstiner contre Dieu et persévérer dans le mal : cependant son inutilité ne vient pas de sa nature, mais, ainsi que nous l'avons dit, de la dépravation du coeur. C'est aussi ce que dit l'Apôtre : « Ignores-tu que la patience de Dieu t'invite au repentir? Mais par la dureté de ton coeur et par ton impénitence, tu l'amasses un trésor de colère pour le jour de la vengeance et de la manifestation du juste jugement de Dieu, qui rendra à chacun selon ses oeuvres » 1. Et ailleurs, après avoir dit: « Nous sommes partout la bonne odeur du Christ, » il ajoute : « Et à l'égard de ceux qui se sauvent, et à l'égard de ceux qui se perdent 2. » Il ne dit pas qu'il est la bonne odeur du Christ pour ceux qui se sauvent, et la mauvaise pour ceux qui se perdent: mais il dit qu'il est uniquement la bonne odeur. Or, ceux qui se sauvent, gagnés parla bonne odeur du Christ, meurent, ainsi que nous l'avons dit souvent, à cette disposition de l'âme qui doit faire place en eux à une volonté bonne inspirée par la grâce divine; ils commencent alors à profiter des jugements de Dieu, qui font le malheur des coeurs dépravés. De la cette hymne sortie d'un coeur heureusement transformé: « Mon âme vivra et vous louera; et vos jugements me soutiendront » 3. Il ne dit pas : Vos bienfaits, ou Vos récompenses, mais vos jugements. Or c'est beaucoup de pouvoir dire avec une sincère confiance: « Eprouvez moi, Seigneur, attentez-moi ; brûlez mes reins et mon coeur. » Et dans la crainte de paraître attribuer à ses forces quoi que ce soit, il se hâte d'ajouter : « Car votre miséricorde est devant mes yeux, et je me suis complu dans votre vérité 4. » Il rappelle la miséricorde dont il a été l'objet, et qui l'a aidé à se conduire selon la vérité : c'est que « toutes les voies du Seigneur sont miséricorde et vérité 5. »