76.
Comprenons donc que le précepte d'aimer nos ennemis, de faire le bien à ceux qui nous naissent, de prier pour ceux qui nous persécutent, n'exige pas que nous prions pour certains péchés de nos frères : autrement, par ignorance, nous mettrions la divine Ecriture en contradiction avec elle-même ; ce qui ne peut pas être. Mais s'il en est pour qui on ne doit pas prier, en est-il contre qui on doive prier ? Jusqu'ici je ne suis pas encore assez éclairé là-dessus. On dit en général : « Bénissez et ne maudissez pas; » et encore: «Ne rendant à personne le mal pour le mal 1. » Mais ne pas prier pour quelqu'un ce n'est pas prier contre lui; car il se peut que vous voyez son châtiment assuré, son salut absolument désespéré; et si vous ne priez pas pour lui, ce n'est point par haine, mais parce que vous êtes convaincu que vous ne lui seriez point utile, et que vous ne voulez pas que votre prière soit repoussée par le Juge souverainement juste. Mais que dire de ceux contre qui nous savons- que des saints ont- prié, non dans l'espoir d'obtenir leur correction, car alors ils eussent prié pour eux, mais en vue de leur damnation éternelle; non encore, comme le prophète, contre celui . qui, a, livré -le Seigneur: car, comme nous l'avons dit, c'était, plutôt prédiction de l'avenir que désir, de punition ; ni enfin, comme l'Apôtre, contre Alexandre, ainsi que nous l'avons suffisamment expliqué; mais comme les martyrs, mentionnés dans l'Apocalypse, qui demandent à être vengés t, bien que le premier. d'entr'eux ait demandé grâce pour ceux qui .le lapidaient ?
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I Cor. IX, 26, 27. ↩