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Et quiconque te contraindra de faire avec lui « mille pas, fais-en deux autres mille. » Il s'agit moins ici d'une démarche réelle que de la disposition du coeur. Car dans l'histoire sainte elle-même, qui fait autorité, vous ne trouverez pas que, les saints aient rien fait de ce genre, non plus que le Seigneur, bien qu'il eût revêtu notre humanité pour nous donner un modèle de conduite. Et cependant vous les trouverez à peu près partout, disposés a supporter les exigences les plus injustes. Mais ces paroles : « Fais-en deux autres mille, » n'auraient-elles pas pour but de compléter le nombre trois, symbole de la perfection, en sorte que, en agissant ainsi, chacun se souvienne qu'il accomplit la justice parfaite, puisqu'il supporte avec bonté les infirmités de ceux qu’il désire voir guéris ? On pourrait alors admettre que c'est dans la même intention que le Christ aurait formulé trois préceptes : le premier, si quelqu'un te frappe sur la joue ; le second, si quelqu'un veut t'enlever ta tunique ; le troisième, si quelqu'un te contraint de faire avec lui mille pas : et, dans ce dernier exemple, il aurait ajouté deux à un pour former trois. Que si ce nombre ne signifie pas ici la perfection, comme nous l'avons dit; mous l'entendons dans ce sens que le Seigneur, commençant parle précepte le plus facile, avance peu à peu jusqu'à demander qu'on supporte deux fois plus qu'il n'est exigé. En effet il veut d'abord qu'on présente la joue gauche quand la droite à été frappée, pour que vous soyez disposé à souffrir une injure moindre que celle que vous avez soufferte : car tout ce qui se rattache au côté droit est plus précieux que ce qui est désigné par le côté gauche, et celui qui a eu à souffrir dans un objet plus cher, supportera plus aisément une perte dates un objet de moindre valeur. Ensuite le Sauveur veut qu'on abandonne son manteau à celui qui vient nous enlever notre tunique; c'est-à-dire l'équivalent, ou quelque chose de plus, mais non pas le double. Troisièmement, en ordonnant de faire deux mille pas de plus avec celui qui en exige mille, il vous commande de supporter le double : voulant insinuer par là que, soit qu'un méchant vous fasse un peu moins de tort qu'il ne vous en a déjà fait,'ou autant, ou plus, il faut tout supporter avec patience.