5.
Quoi donc? Dieu était-il alors autre qu’il n’est maintenant? Loin de là. Que nous dit ensuite le Psalmiste? « C’est vous-même qui êtes mon Roi et mon Dieu1 ». C’est vous-même, vous n’êtes point changé. Les temps sont changés, je le vois; mais le Créateur des temps ne change point. « C’est vous-même qui êtes mon Roi et mon Dieu ». C’est toujours vous qui me conduisez, toujours vous qui venez à mon secours. « C’est vous qui ordonnez le salut de Jacob ». Qu’est-ce à dire: « Vous ordonnez?» C’est-à-dire, bien que cette nature qui vous constitue ce que vous êtes en votre substance, demeure cachée à nos regards, et que vous ne soyez pas intervenu en faveur de nos pères, dans votre essence, de manière qu’ils pussent vous voir face à face; néanmoins, c’est vous qui ordonnez à telle créature qu’il vous plaît de sauver Jacob. Vous voir face à face n’est en effet réservé qu’à ceux qu’aura délivrés la résurrection. Nos pères eux-mêmes du Nouveau Testament, bien qu’ils aient vu vos mystères à découvert, bien qu’ils aient annoncé aux autres ces mystères révélés, ont proclamé qu’ils ne voyaient qu’en énigme et comme dans un miroir; et que vous voir face à face2, était une faveur réservée au moment dont l’Apôtre parle ainsi: « Vous êtes morts et votre vie est cachée en Dieu avec le Christ; or, à l’apparition du Christ qui est votre vie, vous apparaîtrez aussi avec lui dans la gloire3 ». C’est pour ce moment que Dieu nous réserve de le voir face à face; ce qui a fait dire à saint Jean: « Mes bien-aimés, nous sommes les fils de Dieu, mais ce que nous serons un jour ne paraît point encore. Nous savons que, quand il viendra dans sa gloire, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est4 ». Quoique nos pères ne vous aient, donc point vu face-à- face, et tel que vous êtes; quoique cette vision nous soit différée jusqu’à la résurrection; quoique ce soient des anges qui nous ont assistés, « c’est vous néanmoins qui ordonnez le salut de Jacob ». Non-seulement par vous-même, vous nous assistez; mais de quelque créature que vous vous serviez pour nous assister, vous ne l’ordonnez pas moins pour le salut de vos serviteurs que vous opérez par vous-même; et ce qui s’opère pour le salut de vos serviteurs, c’est ce que l’on fait d’après vos ordres. Mais dès lors que vous êtes mon Dieu et mon Roi, et que vous ordonnez le salut de Jacob, pourquoi ces maux que nous endurons?