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« Les nations se sont soulevées ». Comment soulevées? Pourquoi ce soulèvement? Pour renverser la cité de Dieu, au milieu de laquelle est Dieu lui-même? Pour détruire le tabernacle qu’il a sanctifié, qu’il protège de sa face? Non, mais ce soulèvement des nations est un soulèvement salutaire. Voyons en effet la suite. « Les royaumes se sont inclinés1 ». Les royaumes, dit le Prophète, se sont inclinés, ils ne s’élèvent plus pour sévir, ils s’inclinent pour adorer. Quand les royaumes se sont-ils inclinés? Quand s’est accomplie cette prophétie d’un autre psaume: «Les rois de la terre viendront l’adorer, toutes les nations le serviront2 ». Quelle cause a fait incliner les royaumes? Cette cause, écoutez-la : « Le Très-Haut a fait retentir sa voix, et la terre en a tremblé ». Les sacrificateurs des idoles élevaient la voix comme les grenouilles du fond de leurs marais, et avec un bruit d’autant plus fort que ce bruit venait d’une boue et d’une fange plus infecte. Mais quel rapprochement entre ce bruit des grenouilles et les tonnerres des nuées? Car c’est de là que « le Très-Haut fit retentir cette voix dont la terre a été ébranlée »; il a tonné du haut de ses nuées. Quelles nuées sont les siennes? Les Apôtres, ses prédicateurs, qui étaient les porte-voix de ses préceptes, et les instruments de ses miracles. Ils sont des nuées comme ils sont des montagnes; des montagnes à cause de leur hauteur et de leur solidité, des nuées à cause de la pluie et de la fécondité qu’elles répandent. Ces nuées ont arrosé la terre, et c’est d’elles qu’il est dit : «Le Très-Haut a fait retentir sa voix dont la terre a été ébranlée ». C’est encore de ces nuées que Dieu parle quand il menace une certaine vigne stérile, et c’est par suite de cette menace que les montagnes ont été transportées dans le sein de la mer. « Je commanderai aux nuées», dit le Seigneur, « de ne laisser tomber sur elle aucune pluie3 ». C’est là ce qui s’accomplit, comme nous l’avons observé, quand les montagnes furent transférées au sein de la mer; quand il fut dit aux Juifs : « Nous étions envoyés vers vous, mais puisque vous repoussez la parole de Dieu, allons chez les nations4 »:
alors s’accomplit cette menace: « Je commanderai aux nuées de ne laisser tomber sur elle aucune pluies ». Aussi la nation juive est-elle demeurée comme une toison sèche dans l’aire. Car vous savez que ce fait arriva autrefois par miracle. L’aire était desséchée, la toison seule était humide, mais la rosée n’était pas visible dans la toison5. Ainsi le sacrement de la nouvelle alliance était invisible dans le peuple juif. La toison était pour eux ce qu’est pour nous un voile: et le sacrement était voilé dans la toison. Mais dans l’aire, ou chez toutes les nations, l’Evangile du Christ est en évidence; la pluie est visible, la grâce de Jésus-Christ est à découvert; aucun voile ne la couvre. Mais pour en faire sortir la rosée, on a pressé la toison. C’est en la pressant de la sorte qu’ils ont fait sortir le Christ du milieu d’eux, et le Seigneur au moyen de ses nuées a répandu la pluie dans l’aire, et la toison est demeurée dans la sécheresse. C’est donc de là que « le Très-Haut a fait retentir sa voix », c’est de ces nuées qu’est sortie la voix qui a forcé les royaumes à s’incliner et à l’adorer.
