10.
A l’exemple de son divin chef, l’Eglise court altérée, depuis le commencement du monde, et jusqu’à la fin des temps la soif la poussera à courir toujours. N’aurait-on pas le droit de lui dire: O corps sacré de Jésus-Christ, ô sainte Eglise du Sauveur, d’où vous vient cette soif brûlante? que vous manque-t-il? Hé quoi! vous jouissez ici-bas d’une gloire sans égale; vous êtes environnée de l’éclat le plus brûlant; vous êtes parvenue au faîte de la grandeur; manquerait-il encore quelque chose aux prérogatives dont le Seigneur vous a enrichie jusqu’à présent? Vous voyez s’accomplir en vous cette prophétie : « Tous les rois de la terre l’adoreront, et toutes les nations seront «soumises à son empire1». Pouvez-vous désirer davantage? Que souhaitez-vous encore? La multitude des peuples qui vous obéissent ne vous suffit-elle pas? Hélas, répondrait-elle, de quels peuples me parlez-vous? « Ils me bénissaient du bout des lèvres, et, dans le fond du coeur, ils me maudissaient. Il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus2». Une femme affligée d’un flux de sang toucha la frange du vêtement de Jésus, et se trouva guérie : le Sauveur s’était aperçu qu’elle le touchait, car il avait senti qu’une vertu était sortie de lui pour la guérir; il s’étonna de l’action que cette femme s’était permise, et dit à ses disciples : « Qui est-ce qui m’a touché ? » Tout surpris d’une question pareille, ils lui répondirent : « Une foule énorme se presse autour de vous, et vous demandez qui est-ce qui a pu vous toucher? » Et il ajouta: «Quelqu’un m’a touché3», comme s’il avait voulu dire: La foule me presse, mais une seule personne m’a touché. Ceux qui, dans les solennités de , Jérusalem, remplissent nos églises, profitent des fêtes de Babylone pour remplir les théâtres : cette foule immense sert, respecte et honore la foi de Jésus-Christ; mais de quelles personnes se compose-t-elle? De chrétiens qui participent aux sacrements du Sauveur, et qui, néanmoins, détestent ses commandements; de gens qui ne reçoivent pas ces sacrements de la loi nouvelle, parce qu’ils sont encore juifs ou païens : ils honorent, ils louent, ils prêchent la foi de Jésus-Christ; mais, en réalité, « ils ne la bénissent que du bout des lèvres ». Je ne m’arrête pas à leurs paroles, dit l’Eglise: Celui qui m’a éclairé de sa divine lumière sait qu’ « ils me maudissent dans le secret de leur cœur ». Ils me maudissent, dès lors qu’ils cherchent à me ravir ma gloire.