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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) Discours sur les Psaumes
DISCOURS SUR LE PSAUME LXII.

14.

Mais quand j’élèverai mes mains pour invoquer votre saint nom, que vous dirai-je? Que pourrai-je vous demander? Mes frères, toutes les fois que vous élevez vos mains vers le trône de l’Eternel, réfléchissez à ce que vous allez lui demander; car, ne l’oubliez pas, vous vous adressez au Tout-Puissant. Ne sollicitez de sa part rien de ce que lui demandent ceux qui n’ont pas encore la foi : il faut que l’objet de votre prière soit digne de lui et de vous. Voyez quels biens le Seigneur accorde même aux impies; et tu demanderais à ton Dieu des richesses? Mais n’en comble-t-il pas les scélérats eux-mêmes , ceux qui ne croient pas en lui? Ce qu’il donne aux méchants mérite-t-il vraiment ta considération? Ne sois donc pas étonné, si les bienfaits accordés par la Providence aux pécheurs sont peu de chose, puisqu’ils sont dignes de pareilles gens ; n’attribue donc aucun prix aux faveurs que Dieu leur départit. Sans doute, tous les biens temporels viennent du Créateur; pourtant, veuillez y faire attention, les dons qu’il répand sur les impies comme sur les justes, doivent être considérés comme étant de mince valeur: il nous en réserve de bien autres. Toutefois, que les uns nous apprennent à juger sainement des autres. Voyez quels bienfaits il répand sur ceux qui l’offensent. Il fait luire sur eux les rayons du soleil ; mais, remarquez-le, les bons et les méchants se trouvent, en cela, également favorisés. Il fait descendre sur leurs propriétés les ondées du ciel, comme sur le reste de la terre. Qui est-ce qui pourrait dire la fécondité que ces pluies apportent avec elles! Néanmoins, elles sont encore le partage des justes et des pécheurs, car nous lisons dans l’Evangile : « Il fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, et fait tomber la pluie sur les justes et sur les pécheurs1». La chaleur et la lumière du soleil, l’abondance des pluies, et tous les biens, dont elles sont la source, nous devons les demander à Dieu, parce qu’ils nous sont nécessaires; mais à ces bienfaits de la Providence ne doivent pas se borner nos désirs, parce qu’ils sont communs à ceux qui servent le Seigneur et à ceux qui l’offensent. Quel doit donc être l’objet de nos prières, au moment où nous élevons nos mains vers le ciel? Le Psalmiste nous l’indique autant, du moins, que la chose lui est possible. Pourquoi avoir dit : Autant que la chose lui est possible? Autant qu’une bouche d’homme est capable de le dire à une oreille humaine : car l’Esprit-Saint se sert ici de l’intermédiaire d’in homme et de certaines comparaisons pour se mettre à la portée des plus ignorants, et même des enfants. Que dit donc le Prophète? Que demande-t-il? « J’élèverai mes mains vers vous en invoquant votre saint nom ». Qu’obtiendra-t-il? «Mon âme sera remplie et comme engraissée de vos bénédictions ». Pensez-vous, mes frères, qu’il sollicite pour son âme une sorte d’embonpoint matériel? oh! non, il ne borne pas ses désirs à si peu de chose : il ne souhaite ni béliers ni porcs engraissés; il ne ressemble point à ces hommes, qui entrent dans une taverne, pour y demander des mets aussi substantiels et s’y rassasier ; et si nous le croyions capable de pareille chose, en vérité serions-nous dignes d’écouter la parole sainte? Nous devons donc entendre ce verset dans un sens spirituel. Il y a une sorte de graisse propre à notre âme : cet aliment, qui satisfait surabondamment à ses besoins, n’est autre que la sagesse. Les âmes auxquelles elle fait défaut, maigrissent en quelque sorte, et dépérissent à tel point que bientôt elles se trouvent trop faibles pour opérer n’importe quelle bonne oeuvre. Mais pourquoi cette faiblesse extrême dans la pratique des vertus chrétiennes? Parce que l’embonpoint qui résulte pour elles d’une alimentation riche, leur fait défaut, L’apôtre saint Paul nous parle de cet état de luxuriante santé spirituelle, et recommande à chacun de nous de faire le bien écoute ses paroles, les voici : « Dieu aime celui qui donne de bon coeur et avec joie2». Cette vigueur, où notre âme la puise-t.elle, sinon en Dieu, comme à une source abondante? Mais qu’est-ce que cette énergie en comparaison de celle que le Seigneur nous accordera dans le ciel, lorsqu’il sera lui-même notre nourriture? Pendant le cours de cette vie passagère, sur cette terre d’exil, nous ne pouvons pas dire ce que nous serons pendant l’éternité; aujourd’hui, pendant que nous élevons nos mains vers Dieu, nous lui demandons peut-être cette surabondance, au sein de laquelle nous serons un jour rassasiés, où disparaîtra tout à fait notre indigence; où, enfin, nous ne désirerons plus rien, parce que nous posséderons tout ce qui peut ici-bas enflammer nos désirs, tout ce que nous aimons comme étant digne de nos affections. Déjà nos ancêtres sont morts, mais Dieu est toujours vivant: nous ne pouvons, par conséquent, jouir toujours de la présence de nos pères; mais dans le ciel, dans la véritable patrie, nous serons toujours en la présence du Dieu vivant, de notre Père céleste. Dès lors que notre patrie d’ici-bas est terrestre, tant de plaisirs qu’elle nous offre, nous en sortirons un jour: d’autres hommes y naîtront nécessairement, et ils apparaîtront sur la scène de ce monde, pour en éloigner leurs parents, qui l’habitent aujourd’hui. Un enfant ne reçoit l’existence que iour dire à l’auteur de ses jours : Que fais-tu ici? Venir après d’autres, naître, et chasser devant nous ceux qui nous ont précédés dans le chemin de la vie, voilà notre destinée sur la terre : au ciel, nous vivons tous simultanément, sans nous rein placer les uns les autres, parce que personne ne cédera sa place et personne ne sera là pour la prendre. O bienheureuse patrie! qui est-ce qui pourrait en dépeindre les charmes? Sur la terre tu aimes les richesses? Au ciel, tu posséderas Dieu lui-même. Tu éprouves un indicible plaisir à te désaltérer à une source d’eau vive? Y a-t-il rien de plus limpide ou de plus pur que la source de la sagesse éternelle? Le Seigneur, qui a créé l’univers, te tiendra lieu de tout ce que tu peux aimer. «Mon âme sera remplie et comme engraissée de vos bénédictions, et mes lèvres s’ouvriront avec bonheur pour vous louer. Au milieu de ce désert, j’élèverai mes mains vers vous en invoquant votre saint nom: et mon âme sera remplie et comme engraissée de vos bénédictions, et mes lèvres s’ouvriront avec bonheur pour vous louer». Pendant que la soif nous tourmente, c’est pour nous un devoir de prier; quand nous n’en souffrirons plus, au lieu de prier Dieu, nous le louerons: « Et mes lèvres s’ouvriront avec bonheur pour vous louer ».


  1. Matth V, 45. ↩

  2. II Cor. IX, 7. ↩

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