18.
A qui offriront-ils des présents? « Au Dieu terrible, à celui qui ôte l’esprit des princes1 ». L’esprit des princes est un esprit d’orgueil. Ceux-là ne sont pas de l’esprit de Dieu, qui regardent ce qu’ils savent, non comme le bien de tous, mais comme leur bien propre : il est, au contraire, à celui qui se regarde l’égal de tous, qui se met au milieu afin que tous puisent en lui ce qu’ils voudront et autant qu’ils voudront, non ce qui vient de l’homme, mais de Dieu, et dès lors ce qui est à eux puisqu’ils sont de Dieu. Tous ceux-là donc ont l’humilité, car ils ont échangé leur esprit coutre l’esprit de Dieu. Qui leur a fait perdre leur esprit ? Celui qui le fait perdre aux princes, ainsi qu’il est dit dans un autre psaume : « Vous leur ôterez leur esprit et ils seront sans force, et ils retourneront dans leur poussière. Vous enverrez votre esprit, et ils renaîtront, et la face de la terre sera changée2». Quelqu’un a peut-être compris une vérité; s’il se l’attribue en propre, il a encore son esprit; il est à souhaiter qu’il perde son esprit pour acquérir l’Esprit de Dieu; il s’enorgueillit encore avec les princes : il est bon qu’il rentre dans sa poudre, et qu’il dise : « Souvenez-vous, Seigneur, que nous ne sommes que poussière3». Si tu confesses que tu es poussière, de cette poussière Dieu fera un homme. Tous ceux qui l’environnent lui offrent des présents. Tous ceux qui sont humbles se prosternent devant lui pour l’adorer. Ils offrent des présents au Dieu terrible. S’il est terrible, « tressaillez avec crainte, devant Celui qui ôte l’esprit des rois », ou qui réprime l’audace des orgueilleux. « il est terrible aux rois de la terre ». Les rois de la terre sont redoutables en effet, mais il est plus redoutable que tous les rois, Celui qui l’est même aux rois de la terre. Sois un roi de la terre, et Dieu sera terrible pour toi. Mais, diras-tu, comment serai-je un roi de la terre? Gouverne la terre, et tu seras un roi de la terre. Loin de toi cette soif du pouvoir, qui te ferait jeter les yeux sur de vastes provinces pour y déployer ta puissance; gouverne la terre que tu portes. Ecoute l’Apôtre qui gouvernait la terre : « Je combats, non comme frappant les airs; mais je châtie mon corps et je le réduis en servitude, de peur qu’après avoir prêché aux autres, je ne sois réprouvé moi-même4 ». Soyez donc, mes frères, soyez autour de Dieu, afin de ne pas attribuer le mérite de la vérité à celui qui vous l’annonce, quel qu’il soit: que cette vérité soit au milieu de vous comme le bien de tous. Soyez humbles, et si vous comprenez quelque peu ce bien inappréciable, ne vous en attribuez pas le mérite. Ce que nous pourrions comprendre mieux que vous, est à vous; et ce que vous pourriez mieux comprendre, est à nous également; demeurons tous autour de Dieu et dans l’humilité. Et de la sorte en faisant abnégation de notre esprit, nous offrirons des présents à Celui qui est redoutable aux rois de la terre, c’est-à-dire à ceux qui gouvernent leur chair, dans la soumission au Créateur.