19.
« O Dieu, ceux qui violent votre loi, se sont élevés contre moi1 ». Quels sont ces violateurs de la loi? Il n’appelle point ainsi les païens qui n’ont point reçu la lui; et nul ne peut violer un précepte qui n’est pas imposé. L’Apôtre dit d’une manière absolue « Sans loi, il n’y a point de prévarication »; donnant ainsi le nom de prévaricateurs à l’égard de la loi, ceux qui violent cette même loi. Si nous mettons cette parole dans la bouche du Seigneur, les violateurs de la loi seront les Juifs. « Ces violateurs se sont élevés contre moi »; n’observant point la loi, ils ont accusé le Christ de la violer. «Ces contempteurs de la loi se sont élevés contre moi ». De là cette passion du Sauveur que nous connaissons. Or, penses-tu que son corps ne souffre plus rien de semblable? Est-ce possible? « S’ils ont appelé Béelzébub le père de famille, à combien plus forte raison ses domestiques? Le disciple n’est pas au-dessus du maître, ni le serviteur au-dessus de son Seigneur2». Son corps souffre donc de la part des prévaricateurs; ils s’élèvent contre le corps du Christ. Quels sont donc ces violateurs de la loi? Les Juifs oseraient - ils bien s’élever contre le Christ? Non : et ils ne nous font pas subir grande tribulation, car ils n’ont pas encore embrassé la foi, ni connu le salut. Ceux qui s’élèvent contre le Christ, ce sont les mauvais chrétiens, qui font subir l’affliction chaque jour au corps du Christ. Les auteurs de tout schisme, de toute hérésie, tous ceux qui dans l’Eglise vivent dans le désordre, et qui imposent leur désordre aux âmes pieuses, qui les attirent, qui corrompent les moeurs pures par leurs conversations dépravées3, voilà « les contempteurs de la loi qui s’élèvent contre moi ». Ainsi doit parler toute âme pieuse, toute âme chrétienne, mais non toute âme qui n’en souffre point. Or, toute âme qui est chrétienne sait les maux qu’elle endure : si elle connaît ce qu’elle endure, qu’elle reconnaisse ici. ses plaintes; et si elle est au-dessus de la douleur, qu’elle soit encore au-dessus de la plainte; mais si elle ne veut pas demeurer étrangère à la douleur, qu’elle marche dans la voie étroite4. Qu’elle commence à vivre pieusement dans le Christ, alors il devient nécessaire qu’elle endure la persécution. « Tous ceux», dit l’Apôtre, «qui veulent vivre pieusement dans le Christ, souffriront persécution5. Seigneur, les contempteurs de votre loi se sont élevés contre moi; la synagogue des puissants a recherché « mon âme ». Cette synagogue des puissants, c’est l’assemblée des orgueilleux; or, la synagogue des puissants s’est élevée contre notre chef, ou contre Notre-Seigneur Jésus-Christ; et ils ont dit, ils ont crié d’une voix unanime: « Crucifiez-le ! crucifiez6 !» C’est d’eux qu’il est écrit: « Pour ces enfants des hommes, les dents sont des armes et des flèches, et leur langue est un glaive effilé7». Ils ne l’ont point frappé; mais crier, c’était le frapper; crier, c’était le crucifier. Crucifier le Seigneur, c’était obéir à leurs cris, obéir à leur volonté. « La synagogue des puissants a recherché mon âme; ils n’ont point arrêté leurs regards sur vous ». Comment n’ont-ils point arrêté leurs regards? Ils n’ont point compris qu’il était Dieu. Ils eussent épargné l’homme, ils eussent marché selon leur vue. Mais parce qu’il n’était pas un Dieu, qu’il était un homme, fallait-il donc le mettre à mort? Epargne l’homme, et reconnais un Dieu.