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Works Augustine of Hippo (354-430) Discours sur les Psaumes
DISCOURS SUR LE PSAUME LXXXV.

24.

« Car vous, Seigneur, m’avez aidé et m’avez consolé1 » . « Vous m’avez aidé » dans le combat, « et vous m’avez consolé » dans ma tristesse. Nul ne recherche la consolation, s’il n’est dans la misère. Refusez-vous la consolation ? Dites que vous êtes heureux. Mais vous entendez cette parole : « Mon peuple », (déjà vous me répondez, et votre murmure que j’entends, me prouve que vous connaissez les saintes Ecritures. Que ce même Dieu qui l’a gravée dans vos coeurs, la fasse paraître dans vos actions. Vous le voyez donc, c’est vous tromper que vous appeler heureux) « Mon peuple, ils vous appellent heureux, et ils vous jettent dans l’erreur, ils ruinent le sentier où vous marchez2». Tel est encore l’avis de saint Jacques, dans son épître: « Soyez dans l’affliction et dans les larmes, que vos ris se changent en deuil3 ». Vous voyez comment vous parle cet apôtre : comment nous tiendrait-il ce langage dans la sécurité? Ce monde est une terre de scandales, d’afflictions et de grands maux : c’est ici que nous devons gémir afin de nous réjouir dans le ciel ; ici l’épreuve, là haut la consolation, alors que nous dirons: «Parce que vous avez épargné les larmes à nos yeux, et la chute à nos pieds, voilà que je mettrai mes délices dans le Seigneur, en la terre des vivants4 ». Or, la terre est le séjour des morts, ce séjour des morts passera, et alors viendra la région des vivants. Dans ce séjour des morts, il n’y a que travail, que douleur, que crainte, que tribulation, qu’épreuve, que gémissements, que soupirs. Il n’y a que fausse félicité, que véritable misère, car une félicité trompeuse, est une misère véritable. Mais quiconque reconnaît qu’il est ici dans une misère véritable, sera dans la vraie félicité. Et néanmoins parce que tu es dans l’affliction, écoute la parole du Seigneur: «Bienheureux ceux qui pleurent5», Eh quoi! «Bienheureux ceux qui pleurent!» Rien n’est plus près de la misère que les larmes ; rien n’en est plus éloigné que le bonheur; et vous dites qu’ils pleurent, et vous les appelez bienheureux ! Comprenez bien mes paroles, nous dit-il, j’appelle bien heureux ceux qui pleurent. Comment bienheureux? En espérance. Comment pleurent-ils? En réalité. Ils pleurent dans cette vie mortelle, dans ces tribulations, dans cet exil; et comme ils reconnaissent qu’ils sont dans ces misères, ils en gémissent, et ils sont bienheureux. Pourquoi pleurer dès lors? Le bienheureux Cyprien fut contristé dans sa passion, aujourd’hui il a les consolations et une couronne de gloire. Et toutefois, dans ces consolations, il ressent de la tristesse : car Notre-Seigneur Jésus-Christ prie encore pour nous6 : or, tous les martyrs qui sont avec lui, interviennent en notre faveur. Leurs prières ne doivent cesser, que quand cesseront nos gémissements. Or, quand cesseront nos gémissements, nous recevrons tous une même consolation, ne formant plus qu’une même voix, qu’un même peuple, dans une même patrie. Des milliers de millions uniront leurs cantiques aux cantiques des anges, et ne formeront qu’un même choeur avec les Puissances dans l’unique cité des vivants. Où seront les gémissements dans cette cité? Où les soupirs; la fatigue et l’indigence? Où la mort? Qui y fera des oeuvres de miséricorde, y donnera du pain au pauvre, alors que tous y seront rassasiés du pain de la justice? Nul alors ne te dira: Recevez un étranger; il n’y aura là nul étranger, tous y vivent dans leur patrie. Nul ne viendra te dire: Réconcilie tes amis qui sont en querelle; tous jouiront en paix de la présence de Dieu. Nul ne te dira Visite ce malade; la santé et l’immortalité régneront donc éternellement. Nul ne te dira : Ensevelis ce mort tous auront la vie éternelle, Il n’y aura plus d’oeuvres de miséricorde, parce qu’il n’y aura plus de misère. Et quelle sera donc l’occupation au ciel? Le sommeil peut-être? Si nous combattons contre nous-mêmes, en cette vie, bien que nous demeurions dans la maison du sommeil, ou dans une chair pesante, si nous nous éveillons devant ces flambeaux, si cette solennité nous ôte l’envie de sommeiller, combien ce grand jour devra nous porter à la veille? Arrière donc tout sommeil, nous veillerons au ciel. Que ferons-nous alors ? Il n’y aura plus d’oeuvres de miséricorde, parce qu’il n’y aura plus de misère. N’y aura-t-il plus alors ces nécessités que l’on subit aujourd’hui, de semer, de labourer, de tisser, de moudre le blé, de le cuire? Rien de tout cela, parce qu’il n’y aura plus de nécessité. De même qu’il n’y aura plus d’oeuvres de miséricorde, parce qu’il n’y aura plus de misère de même avec la nécessité et la misère, disparaîtront les oeuvres de miséricorde et de nécessité. Qu’y aura-t-il donc ? Quelle sera notre occupation? Notre action ? N’y aura-t-il aucune action, parce que nous serons en repos? Nous serons donc assis dans l’inaction et l’indolence? Si notre amour peut se refroidir, nous pourrons cesser d’agir. Ainsi donc, cet amour qui doit se reposer dans la face de Dieu, qui tend à Dieu, qui espère en lui, quelle n’en sera point l’ardeur, quand nous arriverons à lui? Si maintenant, sans le voir, nous soupirons vers lui avec une ardeur si vive, de quelles clartés ne doit-il point nous illuminer, quand nous le verrons? Quel changement fera-t-il en nous? Que fera-t-il de nous? Et que ferons-nous, mes frères? Que le psaume nous le dise : « Bienheureux ceux qui habitent dans votre maison ». Pourquoi? « Ils vous béniront dans les siècles des siècles7 », Telle sera, mes frères, notre occupation, louer Dieu. Nous l’aimerons et nous le bénirons. Tu cesseras de le bénir, si tu cesses de l’aimer. Mais tune cesseras point de l’aimer, parce qu’en le voyant, tu n’éprouveras aucun ennui; il te rassasiera sans te rassasier. Mon expression te surprend. Moi, si je dis qu’il te rassasiera, je crains que tu ne t’en ailles de lassitude, comme on s’en va d’un dîner ou d’un souper. Te dirai-je alors qu’il ne te rassasiera pas? Mais si je le fais, je crains que l’indigence ne t’effraie, que tu n’imagines quelque besoin, ou du moins quelque désir à satisfaire. Que dirai-je donc, sinon ce que l’on peut exprimer sans pouvoir à peine le penser? Que Dieu nous rassasiera et ne nous rassasiera point; car je trouve l’un et l’autre dans l’Ecriture. S’il est dit en effet: « Bienheureux ceux qui ont faim, parce qu’ils seront rassasiés8 »; il est dit encore dans la Sagesse: « Ceux qui vous mangent auront encore faim, et ceux qui vous boivent auront encore soif9 ». Il n’est pas dit : soif de nouveau; mais: encore soif. Avoir soif de nouveau, ce serait retourner boire, après avoir digéré ce qu’on aurait bu à satiété. Il en est de même de ceux qui vous mangent et qui ont encore faim, car ils ont faim alors même qu’ils vous mangent; et ils ont soif alors même qu’ils vous boivent. Qu’est-ce à dire avoir soif quand on boit? Avoir une soif inextinguible. Si donc Dieu nous réserve des délices ineffables et éternelles, que veut-il de nous maintenant, mes frères, sinon une foi sincère, une espérance ferme, une charité pure , en sorte que l’homme s’avance dans la voie tracée par le Seigneur, qu’il supporte les épreuves, et reçoive les consolations d’en haut?


  1. Ps. LXXXV, 17. ↩

  2. Isa. III, 12. ↩

  3. Jacques, IV, 9.  ↩

  4. Ps. CXIV, 8, 9.  ↩

  5. Matth. V, 5.  ↩

  6. Rom. VIII, 34. ↩

  7. Ps. LXXXIII, 5. ↩

  8. Matth. V, 6.  ↩

  9. Eccli. XXIV, 29. ↩

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